Bénin : saisie des biens de Sébastien Ajavon pour fraude fiscale

Le mois dernier, l’opposant béninois du parti politique l’Union sociale libérale est accusé de « trafic international de drogue ».

 

Les autorités compétentes béninoises ont procédé à la saisie des biens de l’opposant Sébastien Ajavon, poursuivi pour plusieurs chefs d’accusation, entre autres, pour fraude fiscale, a-t-on appris de sources concordantes, lundi.

« La maison de Sébastien Ajavon, située derrière le supermarché Erevan, a été prise d’assaut par un groupe de jeunes sous la supervision d’une équipe de policiers et d’un détachement militaire » qui ont procédé, vendredi, à « une opération de saisie des biens de l’opposant exilé », a rapporté le site « Bénin WebTv ».

D’après le journal local « La Tempête Info », le domicile privé de l’opposant béninois a été « entièrement vidé de ses biens » dans « une opération menée par un contingent militaire ».

« Meubles, appareils électroménagers, matériel roulant, … tout a été ramassé et déposé dans en lieu sûr », a témoigné « La Tempête Info ».

Selon le même journal, la saisie des biens de l’opposant et par ailleurs homme d’affaires a été demandée par l’État du Bénin « pour fraude dans le cadre d’un redressement fiscal d’un montant de 169 milliards FCFA (environs 258 millions euros) pour TVA non reversées aux impôts », dans le trésor béninois.

En réaction à cette saisie, Marc Bensimon, avocat de l’opposant, a affirmé que « Sébastien Ajavon a une vision heureusement plus élevée et soutient sa famille, ses enfants. Ils savent qu’ils ne peuvent pas retourner au Bénin. Ils savent que tous leurs biens sont saisis, mais de là à aller chercher des petites cuillères, la table de la cuisine, les fauteuils… C’est parfaitement inadmissible », selon le site « 24haubenin.bj ».

Le même journal a rappelé que c’est le 22 mars dernier que la Cour suprême a ordonné la saisie de la maison de l’opérateur économique qui avait alors un mois pour vendre ses biens et payer son amende.

Le mois dernier, la justice béninoise a annoncé qu’elle recherche 584 personnes pour diverses infractions. Parmi ces personnes, il y a l’homme d’affaires Sébastien G. Ajavon, recherché pour « trafic international de drogue ».

L’opposant béninois du parti politique l’Union sociale libérale et les autres 583 personnes ont été appelés à répondre des faits qui leur sont reprochés devant la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET). Cette juridiction spéciale a émis des mandats d’arrêt contre les différentes personnes.

Ajavon, qui avait été condamné en 2018 à vingt ans de prison pour trafic de drogue et qui vit en exil en France, avait été une fois de plus condamné en mars 2021 par contumace à une deuxième peine de cinq ans de prison ferme pour « faux, usage de faux et escroquerie ».

L’homme d’affaires béninois avait saisi la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) pour remettre en cause sa condamnation à vingt ans de prison pour trafic de drogue, le 18 octobre 2018, par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme.

En novembre 2019, la CADHP avait condamné l’État béninois à payer 36 milliards de francs CFA (57,3 millions de dollars) à Sébastien Ajavon dans le bras de fer qui les opposait dans le cadre de l’affaire dite des 18 kg de cocaïne qui remonte à octobre 2016.

Chef de file de l’opposition et candidat à la présidentielle de 2016, Sébastien Ajavon, qui a fait fortune dans l’agroalimentaire, était arrivé troisième avec 23 % des voix, avant de soutenir un autre homme d’affaires, Patrice Talon, qu’il a contribué à faire élire au second tour face à Lionel Zinsou.

Mais les relations entre les deux hommes se sont vite dégradées après la présidentielle, Sébastien Ajavon ayant été visé par la justice dans plusieurs affaires.

En octobre 2016, Sébastien Ajavon avait été arrêté après la découverte d’environ 18 kilos de cocaïne pure d’une valeur estimée à 14 millions d’euros dans un conteneur destiné à l’une de ses sociétés.

Il avait été relaxé quelques mois plus tard, faute de preuve et «au bénéfice du doute ».

Mais un tribunal spécial l’avait ensuite condamné à 20 ans de prison et, depuis, Sébastien Ajavon vit en exil en France.

Bénin : l’opposition remet en cause l’indépendance de la Criet

Après la condamnation de Reckya Madougou à 20 ans de prison samedi le 11 décembre 2021 au Bénin, de Joël Aïvo à 10 ans de prison le 07 décembre, l’opposition dénonce la dépendance de la Cour à la volonté du système en place.

La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) condamne samedi 11 décembre l’opposante Reckya Madougou à 20 ans de prison. La cour siégeant à Porto-Novo capitale du Bénin reconnaît l’ancienne garde des sceaux du gouvernement de Boni Yayi, coupable de « complicité d’actes terroristes ».

L’auteure de « Mon combat pour la parole » est accusée d’avoir financé une opération visant à assassiner les personnalités politiques pour empêcher le déroulement de l’élection présidentielle du 11 avril 2021. Une procédure électorale au cours de laquelle la candidature de Mme Madougou a été rejetée. L’ancienne porte-parole du gouvernement, 47 ans, a plaidé non-coupable à la barre. « Cette cour a délibérément décidé de clouer au pilori une innocente. Je n’ai jamais été et je ne serai jamais une terroriste », a déclaré l’opposante. Mais la cour a prononcé contre elle la peine requise par le procureur.  

Reckya Madougou, un cas parmi tant d’autres

Le 07 décembre 2021, la même cour créée en 2018, condamne Joël Aïvo, une autre figure de l’opposition béninoise. La juridiction spéciale inflige 10 ans de prison ferme à l’agrégé de droit public pour « blanchiment de capitaux » et « financement du terrorisme ». C’est dans une affaire de déstabilisation de l’État. Tout comme Reckya Madougou, Joël Aïvo clame son innocence.

En 2018 et 2020, la Criet condamne Sébastien Ajavon par contumace à 25 ans de prison pour trafic de drogue, « faux, usage de faux et escroquerie ». L’opposant arrivé 3è lors de la présidentielle de 2016 vit en exil. Outre ces hommes et femmes politiques, une centaine de blogueurs, militants, manifestants sont en détention au Bénin.         

La Criet instrument du pouvoir ?

Cette condamnation successive des figures politiques au Bénin suscite des réactions au sein de l’opposition. Le parti Les Démocrate s’est mobilisé depuis samedi dernier pour accorder son soutien à Reckya Madougou. Ce parti dénonce à travers les réseaux sociaux et le rassemblement le musèlement de l’opposition. Le mouvement se mobilise pour saisir le chef de l’Etat Patrice Talon le seul qui selon lui, peut modifier la décision de la Criet. Les autres détracteurs de la cour soutiennent qu’elle est l’instrument du régime en place pour neutraliser les opposants.

L’opposant Sébastien Ajavon a saisi l’ONU

Sébastien Ajavon semble décidé à se présenter au scrutin présidentiel d’avril 2021.

L’opposant Sébastien Ajavon entendait en effet déposer sa candidature. Une candidature qui ne pourrait être validée, en raison de la condamnation en 2018.

Pour rappel, l’homme d’affaires a été condamné en octobre 2018 à 20 ans de prison par coutumace par la Cour de Repression des Infractions Economiques et du Terrorisme (Criet) pour trafic de drogue, et un mandat d’arrêt international avait alors été émis contre lui.

Le 28 novembre 2019, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) rendait un second verdict dans cette affaire, condamnant l’Etat béninois à payer à Sébastien Ajavon plus de 36 milliards de FCFA pour préjudice matériel.

Mais le Bénin décidera de se retirer du protocole de la CADHP en 2020

L’opposant béninois qui est exilé en France, en appelle donc au Comité des droits de l’Homme du Haut-Commissariat des Nations unies, estimant avoir été injustement privé de ses droits civiques à la veille du scrutin présidentiel. Il a saisi ce comité pour réclamer la levée de sa condamnation par la Criet, ainsi que la suspension des procédures judiciaires lancées contre lui.

Le dialogue politique au Bénin rencontre des difficultés

Le dialogue politique national pour la résolution de la crise née des législatives du 28 avril 2019 a bien du mal à démarrer.

Alors qu’ils s’attendaient à recevoir leur récépissé d’existence, les partis politiques de l’opposition se sont vu notifier d’autres préalables à remplir. Notamment un nouveau congrès pour actualiser les statuts et règlement intérieur empêchant l’élection dans leurs instances dirigeantes des personnes qui ont maille avec la justice. Ce qui revient à dire que du côté FCBE, l’ancien président Boni Yayi, Valentin Djènontin et Komi Koutché sont concernés. De même que Sébastien Ajavon ne devrait plus être le président d’honneur du parti Union sociale libérale (Usl).

Mais Fcbe et Usl ne comptent pas se séparer de ces personnalités. Pour eux, cette exigence est illégale car aucune loi de la République n’empêche quelqu’un qui ne fait l’objet d’aucune condamnation par la justice d’être dans l’organe dirigeant d’un parti. Dans une déclaration, les Fcbe décident de garder intacte la composition du bureau exécutif.

Concernant Sébastien Ajavon, l’Usl estime que sa condamnation par la Criet n’est pas définitive d’autant plus qu’il y a un pouvoir à cassation. Le responsable à la communication de l’Usl a déclaré sur Sikka TV que le parti, après concertation a décidé de ne répondre à aucune injonction ‘’illégale’’ du ministre de l’Intérieur.