Militaires ivoiriens au Mali: Abidjan dénonce une «banalisation» de ses institutions

La Côte d’Ivoire n’agrée le traitement fait du dossier de ses soldats arrêtés par Bamako.Le gouvernement ivoirien a dénoncé ce mercredi une « banalisation » de ses institutions à la suite de l’arrestation de 49 de ses soldats, encore aux mains des autorités maliennes.

« Il y a une forme (…) de banalisation de nos institutions qui ne saurait être acceptable », a déclaré son porte-parole, Amadou Coulibaly, à l’issue du Conseil des ministres.

Le Conseil national de sécurité (CNS) de Côte d’Ivoire, réuni hier mardi en session extraordinaire, sous la présidence du chef de l’Etat, Alassane Ouattara, a appelé à la libération « sans délai » des militaires arrêtés, dimanche 10 juillet, à l’aéroport de Bamako par les autorités maliennes qui les considèrent comme des mercenaires.

« Pour ce qui concerne la Côte d’Ivoire, le Conseil de sécurité est l’instance suprême qui se prononce sur les questions sécuritaires », a précisé Amadou Coulibaly, ajoutant : « On ne pourrait comprendre qu’il soit mis en doute les conclusions de ce Conseil de sécurité si ce n’est que par ailleurs on veut chercher à analyser la parole de l’Etat ivoirien, (et) cela est inacceptable ».

Commentant cette situation, le porte-parole du gouvernement ivoirien a soutenu qu’« au Mali, ceux qui sont au pouvoir sont des militaires dont certains sont des forces spéciales, ils savent comment renverser un régime. Ce ne sont pas des touristes qui arrivent dans un aéroport (avec leur passeport qui vont renverser un régime) ».

Selon le Conseil national de sécurité de Côte d’Ivoire, ses militaires « injustement arrêtés » au Mali « sont régulièrement inscrits dans l’effectif de l’armée ivoirienne ». Il souligne que ces derniers se trouvaient au Mali dans le cadre des opérations des Éléments nationaux de soutien (NSE) et que leur présence est conforme aux mécanismes de soutien aux contingents des pays contributeurs de troupes en vertu d’une convention signée en juillet 2019 entre la Côte d’Ivoire et l’Organisation des Nations unies.

Ce soutien intervient « dans le cadre des missions de maintien de la paix et est bien connu des autorités maliennes », précise le CNS. C’est dans cette optique, poursuit-il, que des militaires ivoiriens sont présents à l’Aéroport de Bamako. Depuis 2019, sept contingents se sont relayés périodiquement sur ce site, sans aucune difficulté. Selon Abidjan, à son arrivée au Mali, le 10 juillet, dans le cadre de la 8e rotation, une copie de l’ordre de mission du contingent a été transmise aux autorités aéroportuaires maliennes pour attester de la régularité de la mission.

« Aucun militaire ivoirien de ce contingent n’était en possession d’armes et de minutions de guerre à sa descente de l’avion. Les armes du contingent, comme autorisées par les Nations unies pour la protection personnelle et les cas d’auto-défense et selon les procédures en la matière, se trouvaient dans un second avion », conclut la source.

Militaires ivoiriens arrêtés au Mali : peut-on encore éviter le pire ?

Le bras de fer semble engagé entre Abidjan et Bamako dans l’affaire des soldats ivoiriens détenus au Mali.L’arrestation, dimanche 10 juillet, de 49 militaires ivoiriens à l’aéroport de Bamako par les autorités maliennes qui les considèrent comme des mercenaires « dont le dessein est de briser la dynamique de la refondation et de la sécurisation du Mali » a fait réagir Abidjan.

A l’issue du Conseil national de sécurité convoqué, mardi 12 juillet, sous la présidence du chef de l’Etat, Alassane Ouattara, la Cote d’Ivoire exige la libération sans délai de ses soldats qui, selon sa version, sont des « Eléments nationaux de soutien (NSE) », un « mécanisme de soutien aux contingents des pays contributeurs de troupes dans le cadre des Missions de maintien de la paix ».

Cet échange est vu comme un début de brouille diplomatique entre les deux pays par un chercheur malien en sciences politiques qui s’en tient à la thèse du « malentendu ». « On peut penser que les procédures n’aient pas été suivies à la règle ou que des documents prévenant de l’arrivée de ces militaires n’aient pas été transmis à temps ou au bon endroit », explique-t-il.

Climat de méfiance 

Inscrit en master Défense et Sécurité au Centre de Recherche d’études politiques et stratégiques de l’université de Yaoundé 2 (CREPS) au Cameroun, Brice Anatole Minkoa soutient pour sa part que « depuis l’arrivée des militaires au pouvoir et surtout après le dernier coup d’Etat de mai 2021, les relations sont tendues entre le Mali et la Côte d’Ivoire ».

S’exprimant dans l’anonymat, un chercheur ivoirien et spécialiste du Sahel, confie à APA : « Depuis le coup d’Etat, le président ivoirien Ouattara est présenté comme un adepte de la ligne dure et à l’origine des sanctions économiques et financières de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) contre le Mali finalement levées dimanche 3 juillet 2022 ».

Notre interlocuteur invoque également le dossier Karim Keïta. En exil en Côte d’Ivoire après le renversement en août 2020 du régime de son défunt père, Ibrahim Boubacar Keïta, par les colonels qui gouvernent actuellement le Mali, Karim Keïta est visé par un mandat d’arrêt international émis en juillet 2021 par la justice malienne dans l’affaire dite du journaliste Birama Touré, porté disparu depuis 2016.

En novembre 2021, la tentative de saisie d’un appareil de la compagnie aérienne Air Côte d’Ivoire, sur le tarmac de l’aéroport de Bamako avait ravivé la tension, relevée d’un cran par la divulgation en février 2022 d’une conversation téléphonique attribuée au président Alassane Ouattara et à l’ex-Premier ministre malien, Boubou Cissé.

Dans cet élément sonore de cinq minutes partagé à satiété sur les plateformes numériques, il est prêté aux deux hommes d’Etat d’avoir cassé du sucre sur le dos de la junte qui tient les rênes du Mali.

Le parquet de la commune IV de Bamako s’était saisi du dossier et avait ouvert une enquête pour « atteinte ou tentative d’atteinte et complicité à la sureté intérieure et extérieure du Mali ». Cela avait fini par convaincre les plus sceptiques de la détérioration des relations ivoiro-maliennes. Pour autant, personne ne s’attendait à ce qui s’est produit dimanche dernier à l’aéroport de Sénou.

Reprendre en main sa souveraineté 

Il est important de rappeler que « cet incident se produit dans un contexte de volonté de reprise en main par le Mali de sa souveraineté stratégique et militaire ».

Dans ce chapitre, les autorités maliennes n’avaient pas hésité en février 2022 à demander aux militaires français de plier bagage alors que l’opération Barkhane est en cours de retrait de ce pays ouest-africain plongé dans une crise sécuritaire depuis une dizaine d’années.

De même, le contingent danois arrivé à Bamako dans le cadre de la constitution de la Task Force Takuba avait été éconduit par Bamako.

En mai dernier, le Mali s’est retiré du G5 Sahel et de sa force conjointe, en signe de protestation contre le fait qu’on lui ait refusé de présider cette organisation créée en 2014 pour lutter contre les jihadistes. Deux des cinq Etats membres, notamment le Tchad et la Mauritanie ont tenté de faire revenir les autorités maliennes sur leur décision, en vain.

Dès lors, on pourrait se poser la question de savoir jusqu’où est prête à aller Bamako dans son différend avec Abidjan ? Le communiqué du 11 juillet lu à la télévision nationale par le ministre malien de la Décentralisation et de l’Administration territoriale annonce des poursuites judiciaires contre les 49 soldats ivoiriens.

Appel au calme

Du côté des autorités ivoiriennes, la fermeté est certes de rigueur, mais on veut « continuer d’œuvrer pour le maintien d’un climat de paix et de fraternité qui a toujours prévalu entre la Côte d’Ivoire et le Mali ».

À cet effet, les populations ivoiriennes dont une partie se fait entendre sur les réseaux sociaux en menaçant de s’en prendre aux ressortissants maliens, sont appelées au « calme et à la retenue ». « Cette affaire devrait être réglée à l’amiable rapidement, pour éviter qu’elle ne s’aggrave, qu’elle ne s’envenime et que les conséquences soient inattendues pour tout le monde », avertit le chercheur malien sous couvert de l’anonymat.

Abidjan demande à Bamako de « libérer sans délai » ses soldats

Quarante-neuf militaires ivoiriens, des mercenaires selon les autorités maliennes, ont été arrêtés lundi à l’aéroport de Bamako.Se dirige-t-on vers un bras de fer ? Tout porte à le croire. Deux jours après l’arrestation de ses soldats, entrés illégalement au Mali grâce à « deux aéronefs » d’après les autorités de transition du pays, la Côte d’Ivoire a tenu une réunion de son Conseil national de sécurité ce mardi sous la présidence du chef de l’Etat, Alassane Ouattara.

Dans le communiqué final sanctionnant la rencontre dédiée au sort des militaires détenus au Mali, Abidjan appelle à leur libération au plus vite. « La Côte d’Ivoire, qui a toujours œuvré au sein des instances sous-régionales, régionales et internationales pour la paix, la stabilité et le respect de l’Etat de droit, ne peut s’inscrire dans une logique de déstabilisation d’un pays tiers », explique le document.

Le Conseil national de sécurité affirme également que les autorités continueront d’œuvrer pour le maintien du climat de paix et de fraternité ayant toujours prévalu entre la Côte d’Ivoire et le Mali, avant d’inviter les populations au calme et à la retenue.

D’après les informations fournies par le gouvernement malien, les 49 militaires, « dont une trentaine de forces spéciales, étaient en possession d’armes et de munitions de guerre, sans ordre de mission » et auraient fourni des versions différentes sur le motif de leur présence sur le sol malien. L’une d’elles est la sécurisation de la base logistique de la compagnie aérienne Sahelian Aviation Services, partenaire de la Minusma, mission de maintien de la paix onusienne au Mali.

Convaincues qu’elles ont affaire à des « mercenaires » qui voulaient « manifestement briser la dynamique de la refondation et de la sécurisation du Mali », les autorités du pays ont décidé de les mettre à la disposition de la justice.

Quant à la compagnie aérienne « Sahelian Aviation Services », que les soldats étaient censés sécuriser, elle a été invitée à confier désormais sa protection aux forces de défense et de sécurité maliennes. Dans la foulée, Bamako a mis fin « avec effet immédiat » au contrat de protection de cette compagnie par des forces étrangères.

Mali : Des soldats ivoiriens arrêtés pour « mercenariat »

Selon Bamako, les militaires ivoiriens qui seraient arrivés « illégalement » sur le territoire malien ont été mis à la disposition de la justice malienne.Enfin, le gouvernement malien s’est exprimé sur l’interpellation de 49 soldats ivoiriens dimanche 10 juillet à l’aéroport de Bamako.

Selon un communiqué détaillé du ministre de l’Administration du territoire et de la Décentralisation diffusé le lendemain, lundi 11 juillet, ces militaires transportés par deux « aéronefs immatriculés ZS-BBI et UR-CTH, en provenance de la Cote d’Ivoire », seraient arrivés « illégalement » sur le territoire malien.

D’après les informations fournies par le gouvernement malien, ces militaires « dont une trentaine de forces spéciales, étaient en possession d’armes et de munitions de guerre, sans ordre de mission » et auraient fourni des versions différentes sur le motif de leur présence sur le sol malien. L’une d’elles, est la « sécurisation de la base logistique de la compagnie aérienne Sahelian Aviation Services partenaire de la mission onusienne au Mali, Minusma  

Convaincues qu’elles ont affaire à des « mercenaires », « après une analyse des faits », les autorités de Bamako ont décidé de les mettre à la disposition de la justice.

Quant à la compagnie aérienne « Sahelian Aviation Services » qu’ils étaient censés sécuriser, elle a été invitée a confier désormais sa protection aux forces de défense et de sécurité maliennes.

Bamako a aussi décidé de mettre fin, « avec effet immédiat », au contrat allouant l’activité protection de cette compagnie par des forces étrangères, qui sont invitée à quitter le territoire malien.

Suite à l’interpellation des 49 militaires ivoiriens, l’une des versions les reliait aux « éléments de soutien nationaux » plus connus sous son acronyme anglais ( NSE).

Selon un document de l’Onu non classifié consulté à Apa, les NSE dont l’effectif ne doit pas dépasser 50 en principe, doivent leur existence aux besoins des pays contributeurs aux missions de maintien de la paix onusiennes de déployer des éléments supplémentaires pour fournir à leurs contingents des services administratifs et logistiques avec des normes nationales de soutien qui peuvent dépasser ou différer des besoins déclarés de l’Onu.

 « Étant donné que les NSE répondent à des besoins nationaux et non à ceux des Nations-Unies, leur effectif n’est pas considéré comme faisant partie de l’effectif global de la force, mandaté par le Conseil de Sécurité des Nations Unies », précise le document consulté par APA news.

Sur Twitter, Olivier Salgado, porte-parole de la Minusma a rappelé ce principe, ajoutant que les « relèves des contingents de la Minusma sont planifiées et s’effectuent en accord avec les autorités maliennes ».

Le gouvernement malien indique s’être rapproché de la Mission onusienne qui lui a signifié qu’elle n’avait pas de rotation prévue le 10 juillet.

Le gouvernement ivoirien n’a pas encore réagi.

En août 2020, des militaires ont renversé le régime d’Ibrahim Boubacar Keita (IBK) et ont mis en place une transition qu’ils « rectifieront » moins d’un an plus tard.

A partir de janvier 2022, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a sanctionné le Mali pour contraindre les militaires à organiser des élections en vue d’une transmission du pouvoir à des autorités civiles élues.

Le jeu de bras de fer qui s’est alors installé entre les militaires maliens et la Cédéao a été aggravé par une tension diplomatique entre Paris et Bamako, dont le point de départ a été l’annonce en juin 2021 par le président Français, Emmanuel Macron de la réarticulation du dispositif militaire français au Sahel, Barkhane. Les autorités de la transition maliennes avaient accueilli la décision française comme un « lâchage en plein vol » et ont répondu en renforçant leur coopération avec la Russie, en faisant recours aux services de la compagnie militaire controversée, Wagner, pour remplacer les militaires français comme principal soutien dans la lutte contre les groupes jihadistes.

Alors qu’il ne reste qu’une seule étape du retrait définitif de la France du Mali, l’embargo de la Cédéao qui avait un cachet économique et financier a été levé à l’issue du dernier sommet de l’organisation tenu le 3 juillet dernier. 

Le 29 juin, le Conseil de sécurité des Nations-Unies a renouvelé le mandat de la Minusma pour un an supplémentaire.

Mali : quid des rotations des contingents ouest-africains de la Minusma ?

La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) a longtemps pâti de la fermeture des frontières aériennes et terrestres décidée par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao).La levée des sanctions économiques et financières contre le Mali est une bonne nouvelle pour ce peuple et ses dirigeants. Elle ne l’est pas moins pour la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) qui intervient dans ce pays en proie à une crise sécuritaire.

Car la mission de maintien de la paix onusienne est une victime collatérale de l’isolement qui était censé contraindre les autorités de transition maliennes à rendre le pouvoir aux civils dans un délai raisonnable.

Depuis février 2022, 2480 Casques bleus de sept pays membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) sont bloqués au Mali. Pour le Sénégal par exemple, le 11e détachement de la Minusma composé de 850 éléments n’a toujours pas foulé le sol malien alors que le précédent détachement dirigé par le Colonel Théodore Adrien Sarr a bouclé sa mission de quinze mois.

Contacté à l’époque par APA, Olivier Salgado, le porte-parole de la Minusma, avait expliqué que « tous les vols utilisés pour la relève des troupes à destination ou en provenance du Mali sont soumis aux autorisations de survol et d’atterrissage du gouvernement malien ». Le retard significatif qui en découle, a-t-il affirmé, « affecte le moral des troupes ».

La Minusma nourrissait l’espoir de voir la situation se décanter dans les meilleurs délais, mais les choses n’ont pas évolué dans le sens voulu. Maintenant que le Mali n’est plus frappé d’aucune sanction de la Cédéao, M. Salgado a confié à APA que des actions sont menées « pour régler le plus rapidement possible le problème dans le respect des accords avec le pays ».

Le mandat de la Minusma a été renouvelé le 29 juin dernier par le Conseil de sécurité des Nations Unies pour une année supplémentaire. Treize pays ont voté pour alors que la Russie et la Chine se sont abstenus. Lors de la session, le Royaume-Uni et les États-Unis se sont exprimés en faveur d’un renforcement des prérogatives de la Minusma en termes de droits de l’Homme.

Bamako s’y est opposé en déclarant, par l’intermédiaire de son représentant Issa Konfourou, qu’il ne pourrait pas garantir la liberté de mouvement aux enquêteurs de la Minusma sans son accord préalable. Les autorités de transition ont également dit non à l’intervention française pour appuyer les Casques bleus.

Mali : deux Casques bleus tués dans l’explosion d’une mine

Un véhicule blindé d’un convoi logistique de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) a heurté ce matin un engin explosif dans le Nord du pays.Un terrain miné. Au Mali, les groupes jihadistes posent des engins explosifs sur les voies empruntées par les Forces de défense et de sécurité maliennes, mais aussi par les Casques bleus.

Ce mardi, sur l’axe Tessalit-Gao, une voiture transportant des éléments de la force de maintien de la paix onusienne a sauté sur une mine. « Selon un premier bilan, deux Casques bleus ont succombé à leurs blessures et cinq autres ont été grièvement blessés suite à l’explosion. Une force d’intervention rapide a été envoyée sur les lieux et les blessés ont été évacués », a déclaré la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) dans un communiqué reçu à APA.

Après avoir fermement condamné cette attaque, la Minusma a souligné qu’elle « peut constituer un crime de guerre ». Poursuivant, la mission onusienne a relevé « avec préoccupation l’utilisation, par les groupes et éléments terroristes, de la pose d’engins explosifs improvisés pour paralyser ses opérations » au Mali.

De son côté, El-Ghassim Wane, le chef de la Minusma a rendu hommage aux Casques bleus « morts au service de la paix », présenté ses condoléances à leurs proches et à leur gouvernement et souhaité un prompt rétablissement aux blessés.

Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali a été renouvelé d’une année mercredi dernier par le Conseil de sécurité.

Mali : levée de l’embargo, le calme avant une nouvelle tempête ?

Selon l’analyste politique ivoirien, Yannick Houphouët Kouablan, un possible regain de tension est à craindre à l’approche du scrutin de février 2024.Pour le responsable du bureau veille et analyse de risques du cabinet de conseil en sûreté, ISAO au Sénégal, « cette levée partielle des sanctions pesant sur le Mali, devrait déboucher à court terme sur une baisse des tensions avec l’institution régionale », tempère Yannick Houphouët Kouablan.

Toutefois, Yannick Houphouët Kouablan n’écarte pas un possible regain de tension à l’approche du scrutin de février 2024. 

En effet, dans le communiqué final du 3 juillet, la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement, l’institution régionale met en garde les autorités de la transition contre toute tentation confiscation du pouvoir à la présidentielle de 2024. L’article 155 de la nouvelle loi électorale, laisse clairement une brèche à la junte la possibilité de se maintenir au pouvoir à la fin de la transition.

Cette loi dispose que les membres des forces armées ou de sécurité qui désirent être candidats à la prochaine présidentielle doivent démissionner ou demander leur départ à la retraite au moins quatre mois avant le scrutin.

La Cedeao qui a fait du départ des militaires du pouvoir une priorité après 2024, acceptera-t-elle que des membres de l’ex Comité national pour le Salut du Peuple (CNSP) briguent le fauteuil de président ? 

Le nouveau président en exercice de la Cedeao, le président bissau-guinéen, Umaro Sissoco Embaló a du pain sur la planche. Le successeur du président ghanéen, Nana Akufo-Addo à la tête de l’institution, tentera de maintenir le fil du dialogue avec les autorités de transition malienne.

Convergence de vues

A l’issue de son sommet du 3 juillet, la Cedeao a décidé de renoncer aux sanctions économiques et financières contre le Mali prononcées le 9 janvier 2022. 

Une nouvelle accueillie avec soulagement par les maliens qui saluent cette levée partielle des sanctions infligées par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

La décision prise à Accra, la capitale ghanéenne, porte essentiellement sur le volet économique et financier, à savoir le gel des avoirs maliens à la Bceao, la suspension des échanges commerciaux et financiers ou encore la fermeture des frontières aériennes et terrestres.

Une décision qui était plutôt attendue selon Yannick Houphouët Kouablan. « Au cours de ces dernières semaines, le Mali s’est attaché à envoyer plusieurs signaux de bonne volonté à l’endroit de l’institution régionale : adoption d’une nouvelle loi électorale, proposition d’un nouveau chronogramme de la période de la transition (élections présidentielles prévues en février 2024), ou encore ouverture exceptionnelle de la frontière avec la Côte d’Ivoire et le Sénégal, afin de convoyer du bétail, dans l’optique de la fête de Tabaski », décode cet analyste.

Vingt-quatre heures après la levée des sanctions, le gouvernement malien a réagi en notant « enfin une convergence de vues ayant permis de parvenir à un compromis et la prise en compte des demandes fortes du peuple malien, à savoir la nécessité de mener des réformes politiques et institutionnelles avant d’organiser des élections ».

Même s’il se réjouit de cette décrispation, Séga Diarrah soutient que la Cedeao n’aurait jamais dû en arriver là avec le Mali. « Un embargo est avant tout un acte politique qui utilise les besoins économiques d’un pays. C’est pourquoi le principe de liberté commerciale consacré par l’OMC interdit de son côté les embargos. De plus, l’Assemblée générale des Nations Unies a appelé dès 1989 la communauté internationale à renoncer à ce type de pratique, parce qu’elles favorisent les pays riches sur les pays pauvres », souligne-t-il en invitant la Cedeao à « humaniser ses embargos ».

Sommet ordinaire de la Cédéao : de bonnes nouvelles pour le Mali

Les chefs d’Etats et de gouvernement de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest ont levé les sanctions infligées à Bamako depuis janvier 2021.La décision était attendue. C’est désormais chose faite. Selon plusieurs sources présentes à Accra (Ghana), la Cédéao a levé les sanctions économiques et financières imposées au Mali depuis janvier 2021. Le sommet d’Accra a également décidé du retour à Bamako des diplomates de la Cédéao.

Ces dernières semaines, Bamako a multiplié les actes de bonne volonté pour aboutir au résultat obtenu ce 3 juillet 2022.  

Une loi électorale fixant les modalités de l’organisation des élections a été adoptée par le Conseil national de transition (CNT) et promulguée par le chef de l’Etat de transition, le colonel Goïta. De même, un projet de chronogramme des élections selon lequel la présidentielle est prévue en février 2024 a été présenté aux partis politiques. 

Dans deux mois, le Mali devrait également disposer de son projet de nouvelle Constitution. Les personnes chargées de le rédiger ont été nommées par décret mercredi dernier.

Les dirigeants ouest africains, réunis pour la 61e session ordinaire de l’organisation sous-régionale ont aussi acté une transition de 24 mois à compter du 1 juillet 2022 pour le Burkina Faso. Par la même occasion, ils ont rejeté la proposition de 39 mois de transition formulée par la junte en Guinée et décidé de la nomination d’un nouveau médiateur.

Sommet de la Cedeao: quel sort pour les putschistes ouest africains ?

A Accra, la capitale du Ghana, se réunissent ce dimanche 3 juillet 2022, les chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao).Les dirigeants de la sous-région ouest africaine planchent sur la situation politique au Mali, en Guinée et au Burkina Faso. A l’issue de la présentation de rapports de médiateurs désignés pour ces trois pays, il est attendu que les dirigeants ouest africains prennent des décisions en faveur du maintien ou non des sanctions décidées par l’organisation sous-régionale contre ces pays depuis que des militaires y ont pris le pouvoir en 2020, 2021 et 2022. 

Réunis le 4 juin 2022 lors d’un sommet extraordinaire, les chefs d’Etats étaient divisés sur le sort à réserver au Mali qui, depuis le deuxième coup de force de mai 2021 mettant fin à la transition mise en place après le coup d’Etat d’août 2020, donne du grain à moudre à la Cedeao. 

Certains présidents étaient pour le maintien des sanctions pour contraindre le régime du colonel Assimi Goïta à réduire la durée de la transition à 16 mois conformément au souhait de la Cedeao, alors que d’autres avaient plaidé leur levée pour des raisons humanitaires. 

Contre toute attente, la junte malienne a décidé, au lendemain de ce sommet, de rester au pouvoir pour 24 mois supplémentaires. Une décision contestée par la Cedeao.

Pour autant, les échanges entre les deux parties se sont poursuivis pour aboutir à un « chronogramme mutuellement acceptable de transition ». 

Ces derniers jours, Bamako semble s’être inscrit dans une dynamique d’attendrissement de l’organisation régionale. Dans un premier temps, une loi électorale fixant les modalités de l’organisation des élections a été adoptée par le Conseil national de transition (CNT) et promulguée par le chef de l’Etat de transition, le colonel Goïta. A cela s’ajoute la présentation aux partis politiques d’un projet de chronogramme des élections.   

S’agissant du cas burkinabè, des avancées ont été notées à l’issue de la visite du médiateur de l’organisation sous-régionale, l’ex-président nigérien, Mahamadou Issoufou, à Ouagadougou à la veille du sommet d’Accra de ce 3 juillet. 

Selon un communiqué sanctionnant la visite du médiateur, « le gouvernement (du Burkina Faso) s’est montré disposé à parvenir, avec la Cedeao, à une durée consensuelle de la transition », fixée à 36 mois par la Charte de la transition. 

Suspendue des instances de la Cedeao, la Guinée espère éviter un durcissement des sanctions. Dans cette perspective, le lieutenant-colonel Mamadi Doumbouya, auteur du coup d’Etat du 5 septembre 2021 contre le président Alpha Condé, a envoyé des missions diplomatiques dans plusieurs capitales ouest africaines pour plaider sa cause.

Cependant, ces efforts risquent d’être sapés par le Front national pour la défense de la constitution (FNDC) qui, à la veille du sommet du 3 juillet, « sollicite la bienveillance de la Cedeao » pour l’ouverture d’un cadre de dialogue avec les acteurs politiques et la société civile.

Cette principale organisation de la société civile et de l’opposition a aussi demandé à la Cedeao d’intervenir pour « la fixation d’un délai raisonnable et consensuel de la transition, au lieu des 39 mois imposés par le Comité national  du rassemblement pour le développement (CNRD) de manière unilatérale, le respect des droits et libertés fondamentaux, notamment le droit de manifester conformément aux engagements nationaux, régionaux et internationaux de la Guinée ».

Au-delà des décisions attendues sur le sort de ces trois pays, la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement élira le remplaçant du président ghanéen, Nana Akufo Addo, ci-devant président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest  (Cedeao) et nommera le nouveau président de sa commission pour la période 2022-2026.

Mali : la task force Takuba plie bagage

Les derniers soldats de cette force conjointe européenne ont quitté Bamako le 30 juin.Après la force française Barkhane, c’est au tour du contingent européen de forces spéciales, Takuba, de se retirer du Mali. « La réorganisation du dispositif militaire français au Sahel, décidée en étroite relation avec les partenaires européens et nord-américains, a conduit à la fin des opérations de la task force Takuba au Mali  », lit-on dans le communiqué de l’État-Major des Armées françaises diffusé ce vendredi.

Lancée le 27 mars 2020, la force Takuba a réuni jusqu’à dix nations contributrices : Belgique, République tchèque, Danemark, Estonie, France, Hongrie, Italie, Pays-Bas, Portugal et Suède. La capacité opérationnelle initiale a été déclarée le 15 juillet 2020 et la pleine capacité opérationnelle le 2 avril 2021.

Avec sa force d’intervention rapide motorisée et héliportée et son unité de protection fortes de 800 hommes, « Takuba a prouvé son efficacité en apportant un soutien continu aux Forces armées maliennes (Fama) », souligne le document.

Selon l’État-Major français, la force conjointe européenne est un succès stratégique et tactique. Elle aurait notamment permis la formation d’unités maliennes adaptées au combat contre les jihadistes, évitant ainsi la territorialisation des groupes armés terroristes en particulier de l’État Islamique au Grand Sahara (EIGS) dans la zone des trois frontières (Burkina, Mali et Niger).

Contrairement à Barkhane qui a pris ses quartiers dans la capitale nigérienne Niamey, Takuba est quant à elle vouée à disparaître. Car aucun pays sahélien n’a formulé une demande pour l’accueillir.

L’opération Barkhane avait été lancée le 1ᵉʳ août 2014 en remplacement de Serval dont l’objectif était de lutter contre les groupes jihadistes qui menaçaient de prendre Bamako.

« Avant, tout n’allait pas bien. Mais avec ce départ de ces forces spéciales et la fin de la couverture aérienne, cela donne plus de liberté aux jihadistes présents dans la zone », a affirmé Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des groupes terroristes.

Sur Twitter, les internautes maliens sont partagés entre réjouissance et inquiétude d’un lendemain incertain. « La France officialise la fin de la force Takuba au Mali. Une organisation militaire (qui pouvait) agir sans l’aval du gouvernement malien. Une victoire pour notre peuple », se félicite Amir Nourdine Elbachir.

Du côté d’Ibn Zackarya, c’est l’anxiété qui prédomine. Depuis l’annonce du retrait de la force Takuba, l’État Islamique au Grand Sahara (EIGS) et le Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans (Jnim) s’affrontent pour le contrôle de la zone des trois frontières, signale-t-il.

Suite au départ des soldats de Barkhane de la base de Ménaka, au Mali, l’EIGS a assiégé des localités en y commettant des massacres, poursuit-il, non sans ajouter que « ces forces (Barkhane et Takuba) empêchaient la progression jihadiste ».

« Les populistes, avec des décisions irréfléchies dont le seul but était de se maintenir au pouvoir, ont condamné la population de ces zones tout en étant incapables de leur venir au secours », peste Ibn Zackarya.

De son côté, Sidha Sudarshan regrette qu’« aucune disposition » n’ait été prise avant de demander aux Européens de se retirer. « Tant que les révolutionnaires africains agiront sans planification stratégique, la domination étrangère aura de beaux jours devant elle », soutient-il.

Enfin, Alhassane Tamesna estime que maintenant les militaires au pouvoir « devraient partir sur le terrain pour protéger les populations meurtries » au lieu de « rester dans des salons à Bamako ».

« La Minusma, pas un prétexte pour une présence française au Mali » (expert)

Séga Diarrah, journaliste et politologue malien, décrypte pour APA le renouvellement du mandat de la Minusma, l’adoption de la loi électorale et ses éventuelles répercussions sur le bras de fer avec la Cédéao.Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) a été prolongé d’une année. Le Mali a émis des réserves comme la liberté d’enquêter sur les violations des droits humains. Comment analysez-vous la situation ?

Entre les autorités de la transition malienne et la communauté internationale, une défiance s’est instaurée depuis le coup de force de mai 2021 ayant mis un terme à la transition entamée après le coup d’Etat d’août 2020 contre Ibrahim Boubacar Keïta (IBK).

Bamako veut définitivement tourner le dos à la solution franco-onusienne de résolution de la crise sécuritaire au profit d’un partenariat avec la Russie. Le départ de la mission de l’Organisation des nations unies (Onu) du Mali serait la dernière étape de ce processus.

Sauf que la France, soutenue par la communauté internationale, après dix années de présence dans le Sahel à travers l’opération Serval puis Barkhane, n’envisage pas la fin de cette manière.

Dans ce contexte, le Conseil de sécurité de l’Onu devient un espace d’influence. Les autorités maliennes invoquent leur souveraineté et souhaitent créer des restrictions de mouvement à la Minusma qui s’intéresse de plus en plus aux activités de l’armée malienne et des instructeurs russes.

Finalement, le Conseil de sécurité a compris les enjeux pour bien trancher. Même si la Minusma est libre de ses mouvements au Mali afin de pouvoir enquêter sur les éventuelles violations du droit humanitaire, elle ne sera pas un prétexte pour maintenir une présence militaire française quelconque sur le sol malien.

 

Une nouvelle loi électorale a récemment été votée au Mali et l’Autorité Indépendante de Gestion des Elections (AIGE) créée. Pour certains observateurs, c’est un nouveau pas vers la transmission du pouvoir aux civils. Etes-vous de cet avis ?

Non ! Je ne pense pas que cette loi fournit suffisamment de garanties pour un retour à l’ordre constitutionnel. L’adoption de la nouvelle loi électorale le 17 juin dernier et sa promulgation une semaine après répondent à une volonté opportuniste. Avant tout, il s’agit d’arriver à la réunion de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) du 3 juillet prochain avec des avancées pour espérer une levée des sanctions.

En outre, la nouvelle loi électorale est très différente du projet de loi déposé par le gouvernement et qui se rapprochait plus des aspirations de la population. Dorénavant, la junte aura la mainmise sur le processus électoral et les militaires pourront participer à l’élection présidentielle.

 

Peut-on percevoir la nouvelle loi électorale comme un moyen pour les militaires de se maintenir au pouvoir ? Si oui, est-ce que cela ne sera pas à l’origine de nouvelles tensions entre Bamako et la Cédéao ?

Cette loi électorale viole la charte de la transition adoptée en octobre 2020 et révisée en février 2022 avec l’assentiment de l’ensemble des acteurs maliens et de la Cédéao. Cependant, l’organisation régionale ne peut pas à interférer dans les lois d’un pays souverain. Par contre, la Cédéao peut exiger le respect de la charte de la transition.

L’article 155 de la nouvelle loi électorale encourage clairement les candidatures militaires. Le Mali est un pays en crise. Pendant les dix dernières années marquées par une insurrection jihadiste sur une partie considérable de son territoire, nous avons assisté à son effondrement progressif sans possibilités de renaissance.

Les stigmates des 23 années de dictature de Moussa Traoré, qui ont connu leur terme en 1992 avec l’arrivée d’Amadou Toumani Touré (ATT) au pouvoir, sont encore visibles dans la société. Le désarroi et l’amertume alimentent le dégagisme. Ils n’autorisent pourtant pas la politique de la terre brûlée. Car les Maliens sauront faire les meilleurs choix le moment venu.

Variole du singe: l’Afrique doit miser sur le dépistage (OMS)

À la date du 28 juin, 1821 cas de variole du singe ont été notifiés par 13 pays sur le continent.Alors que des cas de variole du singe ont été notifiés dans trois pays africains qui n’avaient jusqu’alors jamais signalé de cas d’infection par cette maladie, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) collabore avec les autorités sanitaires nationales de la région. L’objectif est de renforcer la surveillance et le diagnostic en laboratoire afin de détecter des cas et d’éviter une propagation silencieuse du virus.

Au total, 1821 cas de variole du singe ont été notifiés par 13 pays sur le continent à la date du 28 juin 2022, écrit l’OMS dans son dernier rapport consulté par APA. Parmi ces cas signalés, 109 ont été confirmés en laboratoire dans neuf pays. Le nombre de cas confirmés sur le continent représente 2 % des plus de 4500 cas confirmés dans le monde.

Cependant, explique l’organisme onusien, on enregistre un grand nombre de cas suspects en Afrique, et 81 % de ces cas ont été recensés en République démocratique du Congo, ce qui souligne la nécessité d’une capacité de diagnostic accrue.

« Si tous les pays africains disposent de machines d’amplification génique (PCR) nécessaires pour détecter la variole du singe grâce au renforcement des capacités de laboratoire intervenu dans le cadre des efforts de riposte à la pandémie de Covid-19, beaucoup de ces pays manquent de réactifs et, dans certains cas, de formation dans les domaines du prélèvement, de la manipulation et de l’analyse des échantillons », souligne l’OMS.

C’est pourquoi, elle dit s’efforcer d’obtenir 60.000 tests pour l’Afrique, dont environ 2000 tests et réactifs à expédier dans des pays à haut risque et 1000 tests et réactifs à expédier dans les pays moins exposés au risque de variole du singe.

Au cours du mois dernier, elle a offert à cinq autres pays africains des réactifs, ce qui porte à 12 le nombre de pays de la région dotés d’une meilleure capacité de diagnostic de la variole du singe. Un autre groupe de pays d’Afrique de l’Ouest recevra des réactifs après la formation organisée à l’intention de ces pays.

« La propagation géographique de la variole du singe dans des parties de l’Afrique où aucun cas n’a encore été détecté est un signe inquiétant. Il est essentiel que nous accompagnions les efforts des pays pour renforcer la surveillance et le diagnostic en laboratoire, qui sont les pierres angulaires de la lutte contre la maladie », a indiqué Dr Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique.

Mali : la commission de rédaction d’une nouvelle Constitution mise sur pied

Les personnes chargées de rédiger la loi fondamentale ont été nommées par décret ce mercredi.Dans deux mois, le Mali devrait tenir son projet de nouvelle Constitution. En sa qualité de chef de l’Etat, le Colonel Assimi Goïta a porté son choix sur Fousseyni Samaké, ancien Secrétaire Général du gouvernement, pour diriger la commission de rédaction de la loi fondamentale. Cette structure a également été créée par décret le 10 juin dernier.

L’ancien président de la Cour suprême, Wagi Ouadeye, a été nommé Rapporteur général. Il sera secondé par le médiateur de la République, Aminata Mallé. Au total, 23 experts de profils différents ont été choisis pour leurs compétences.

Parmi eux, il y a le juriste Brahima Fomba. Ce dernier, docteur en Droit public, est l’auteur du livre « La Constitution malienne de 1992 : De la Rigidité à l’impossible révision ». Dans cet ouvrage, publié aux éditions L’Harmattan en novembre 2020, M. Fomba analyse les trois tentatives de révision de la Constitution malienne depuis l’avènement de la IIIe république.

La commission de rédaction de la nouvelle Constitution, dans le cadre de sa mission, peut solliciter l’ensemble des forces vives de la nation. Elle est tenue de faire un rapport tous les quinze jours ou en cas de besoin au président de la transition. Ce processus de révision constitutionnelle ne fait pas l’unanimité dans l’opinion publique malienne.

Les militaires, ayant déposé le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) en août 2020, ont neuf mois plus tard abrégé la transition dirigée par Bah N’daw. Ce coup de force a été une source de tension entre le Mali et ses partenaires internationaux.

En désaccord avec les nouvelles autorités sur la durée de la transition, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a décidé de sanctionner Bamako. Récemment, le colonel Assimi Goïta a prolongé la période transitoire de deux ans à partir du 26 mars 2022.

Le dénouement de ce bras de fer est espéré le 3 juillet prochain à Accra, au Ghana, lors du Sommet extraordinaire de la conférence des chefs d’Etat de l’organisation régionale.

Mali : le mandat de la Minusma renouvelé

La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) va se poursuivre jusqu’au 30 juin 2023.Le Conseil de sécurité de l’Organisation des nations unies (Onu) s’est réuni ce mercredi pour discuter principalement de l’opération de maintien de la paix au Mali confronté à la menace jihadiste. Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma), expirant ce jeudi, a été prolongé d’une année.

Lors de cette session, le Royaume-Uni et les États-Unis ont demandé un renforcement des prérogatives de la mission onusienne en matière de droits humains. En outre, ces deux pays ont souhaité que le soutien de la Minusma aux Forces de défense et de sécurité maliennes soit conditionné à un respect strict de la Politique de diligence voulue en matière de droits de l’Homme de l’Onu.

C’est pourquoi, la nouvelle résolution proposée par la France contient un paragraphe imposant aux autorités maliennes de garantir à la Minusma une liberté de mouvement notamment pour enquêter sur les violations des droits de l’Homme.

A ce sujet, Issa Konfourou, l’ambassadeur permanent du Mali aux Nations Unies, a déclaré que « pour des impératifs de respect de la souveraineté du Mali, de coordination et de sécurité, les mouvements de la Minusma ne peuvent se faire qu’avec l’accord des autorités compétentes maliennes ».

Poursuivant, le diplomate malien a assuré que son pays « n’est pas en mesure de garantir la liberté de mouvement pour des enquêtes de la Minusma sans l’accord préalable du gouvernement (et) n’entend pas exécuter ces dispositions malgré leur adoption par le Conseil de sécurité ».

Sur Twitter, Julien Antouly, chercheur à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) au Mali, a affirmé que l’autorisation accordée aux forces françaises pour appuyer la Minusma est supprimée à la demande de Bamako. Par conséquent, l’opération Barkhane n’a plus de mandat pour agir au Mali.

Quant à la Force conjointe du G5 Sahel, a-t-il poursuivi, le soutien de la Minusma est suspendu à cause du retrait du Mali de l’organisation. Enfin, le Conseil de sécurité de l’Onu s’attend à ce que le Secrétaire Général produise un rapport sous 6 mois sur la situation politique au Mali, la coopération avec les autorités et les conditions nécessaires au maintien de la Minusma.

Uemoa : un taux de croissance de 6,1 % en 2021

L’économie de l’espace communautaire se remet de la pandémie de Covid-19.Le taux de croissance de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) a retrouvé son niveau d’avant le nouveau coronavirus. Selon son Rapport d’exécution de la surveillance multilatérale du premier semestre 2022 examiné par le Conseil des ministres des Etats membres, la croissance est 6,1 % en 2021 contre 1,8 % un an plus tôt.

« Le Conseil a noté que l’activité économique s’est déroulée dans un contexte de poussée inflationniste avec un taux d’inflation annuel moyen de 3,6 % contre 2,1 % en 2020, en lien notamment avec la hausse des prix des produits alimentaires consécutive à la mauvaise campagne céréalière enregistrée en 2021 », rapporte le communiqué final du Conseil des ministres de l’Uemoa reçu ce mercredi à APA.

La réunion a été tenue le 24 juin dernier au siège de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao), à Dakar (Sénégal), sous la présidence de Sani Yaya, ministre de l’Economie et des Finances du Togo, son président en exercice.

Durant les travaux, le Conseil a relevé que ces perspectives restent, toutefois, fragilisées par l’incertitude sur la durée de la crise en Ukraine et son impact sur la hausse des prix de certains produits de première nécessité et sur les cours des matières premières, la persistance de la crise sécuritaire au Sahel et son extension vers les zones côtières, ainsi que la crise sanitaire.

Parmi les recommandations adoptées par les ministres de l’Economie de l’Uemoa, il y a celle relative aux orientations de politique économique aux Etats membres de l’Union pour l’année 2023. Par cette recommandation, le Conseil invite les Etats membres à continuer de renforcer les mesures visant à limiter l’impact de la hausse des prix et à préserver le pouvoir d’achat des populations, notamment celui des plus vulnérables, tout en poursuivant les efforts de maîtrise du déficit budgétaire.

Le Conseil des ministres a adopté la Décision portant définition et détermination de l’agrégat recettes fiscales et celle portant définition et détermination du contenu de la masse salariale dans les Etats membres de l’Uemoa.

Le premier texte doit permettre de déterminer une méthodologie commune de calcul de cet agrégat et le second est censé créer une approche commune précisant les composantes de l’agrégat masse salariale. Tout cela pour l’atteinte des critères de convergence dans le cadre de la surveillance multilatérale des politiques macroéconomiques de l’espace communautaire.

La réunion de Dakar a vu la participation d’Abdoulaye Diop, président de la Commission de l’Uemoa, Mamadou Diop, vice-gouverneur, chargé de l’intérim du Gouverneur de la Bceao, Serge Ekue, président de la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) et de Badanam Patoki, président du Conseil Régional de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers (CREPMF).

Mali: en fin de mandat, quel avenir pour la Minusma ?

Alors que leur mandat doit expirer jeudi 30 juin 2022, les casques bleus engagés au Mali seront édifiés ce mercredi sur leur renouvellement ou non lors d’un vote du Conseil de sécurité des Nations unies.En avril 2012, le Mali est sous les décombres. Immense territoire du Sahel, ce pays se découvre comme un Etat failli. Des groupes jihadistes et rebelles s’emparent d’une grande partie du territoire malien et font régner leur loi, provoquant le coup d’Etat contre Amadou Toumani Touré (ATT). Président par intérim, Dioncounda Traoré accepte l’intervention de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies de stabilisation au Mali (Minusma), en plus de l’aide militaire de la France, pour aider son pays à retrouver sa souveraineté territoriale.

Le 25 avril 2013, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) est créée par la résolution 2100 du Conseil de sécurité de l’Onu. Les soldats onusiens ou casques bleus sont déployés ainsi avec des missions bien différentes que celles de leurs collègues français de l’opération Serval puis Barkhane.

« Guidées par trois principes fondamentaux que sont le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force (sauf en cas de légitime défense ou lorsque leur mandat le rend indispensable, les opérations de maintien de la paix sont devenues aujourd’hui polyvalentes et multidimensionnelle », décrit le rapport de la commission politique de l’assemblée parlementaire de la Francophonie sur les missions de maintien de paix de l’Onu.

Présenté en mars 2018 à Liège, en Belgique, par l’ancien député belge Alain Onkelinx, le document indique que « ces opérations sont appelés à maintenir la sécurité, mais aussi à faciliter le processus politique, à protéger les civils, à aider au désarmement, à la mobilisation et à la réinsertion des anciens combattants, à soutenir l’organisation d’élections libres, à protéger et à promouvoir les droits de l’homme et à rétablir la primauté du droit ».

Un bilan mi-figue, mi-raisin

Neuf ans après, la Minusma fait partie des treize opérations de l’Onu encore actives dans le monde. Mais pour quel bilan ?

« Remplaçant sur de nombreux plans l’Etat malien défaillant, la Minusma a rempli à minima, en lien avec d’autres acteurs y compris parmi les groupes armés signataires, des missions régaliennes : patrouille de présence, accompagnement et montée en gamme des forces de sécurité, accompagnement des populations isolées ou fragiles, accompagnement des autorités politique dans le cadre des accords d’Alger, fournitures de services de base au bénéfice des populations et médiation entre groupes armés signataires », souligne dans un document transmis à APA, Amanar-Advisor, cabinet d’intelligence stratégique et de veille sur le Sahel, basé à Strasbourg, en France.

En septembre 2013, le Mali est revenu à un ordre constitutionnel marqué par l’élection d’Ibrahim Boubacar Keita comme président de la République, à l’issue d’un scrutin à deux tours. En 2015, un accord est trouvé entre Bamako et des rebelles indépendantistes pour un retour progressif vers la paix au nord Mali. Il s’agit de l’Accord d’Alger.

Par contre, la situation sécuritaire ne s’est pas améliorée. Délogés des villes du nord, les jihadistes ont créé des foyers de tension dans le centre et ont même exporté l’insurrection en dehors du territoire malien. Ils ont remis en cause l’efficacité de la présence de l’opération Barkhane qui a remplacé l’intervention Serval en 2014 et l’action de la Minusma même si celle-ci n’est pas censée faire du contreterrorisme.

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La montée de l’insécurité sera d’ailleurs l’une des causes de la déposition d’Ibrahim Boubacar Keita en août 2020 par des colonels qui, neuf mois plus tard, écartent le président de la transition Bah N’daw et son Premier ministre Moctar Ouane pour s’installer au pouvoir.

En réaction, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a exigé l’organisation d’élections dans un délai raisonnable pour la transmission du pouvoir aux civils, sous peine de sanctions. Une étape qu’elle franchira le 9 janvier 2022 en prononçant un embargo sur le Mali, après le report des élections présidentielle et législatives initialement prévues en février 2022.

En conflit depuis peu avec Bamako après qu’elle a décidé de réarticuler l’opération Barkhane, Paris appuie cet embargo. Cette position braque davantage la junte malienne qui, non seulement, dénonce les accords militaires liant le Mali et la France depuis 2013, mais compromet également la conduite des opérations de la Minusma dont le mandat prend fin le 30 juin 2022.

La Division des droits humains de la Minusma n’a plus carte blanche pour enquêter sur tous les cas d’atteintes ou violations des droits de l’Homme qui lui sont rapportés. Après des allégations d’exactions contre des civils à Moura (centre), lors d’une opération de l’armée malienne accompagnée d’éléments de la compagnie militaire controversée russe Wagner, les enquêteurs de l’Onu n’ont pas été autorisés à effectuer le déplacement sur le site pour « établir les faits ». À cela s’ajoute le blocage par Bamako, depuis février 2022, de la rotation de 2480 casques bleus de sept pays d’Afrique de l’Ouest, membres de la Cedeao.

Malgré ces difficultés à mener convenablement sa mission sur le terrain, l’Organisation des nations unies n’a pas l’intention de quitter le Mali où elle compte à ce jour 12.266 militaires, 1720 policiers et 1180 civils déployés sur douze sites répartis en secteurs entre le nord et le centre.

La Minusma, objet de débat à l’Onu

Le 13 juin, lors de la réunion d’information sur le Mali au Conseil de sécurité, le diplomate mauritanien El Ghassim Wone, chef de la Minusma, a formulé le besoin de prolongation du mandat de la force onusienne. Pour lui, sa présence est « aussi nécessaire que jamais » parce que les civils n’ont jamais été aussi vulnérables.

La dernière note trimestrielle de la Minusma a relevé 449 actes de violences affectant un total de 812 civils dont 543 décès imputables aux groupes armés jihadistes et aux forces de défense et de sécurité maliennes. Le rapport présenté par son représentant au Mali plaide aussi pour l’augmentation des effectifs de la Minusma de 2069 personnes en uniforme.

En outre, le Conseil de sécurité devrait normalement renouveler le mandat de la Minusma pour une année supplémentaire. Bamako y est favorable sous quelques conditions. « Pour le Mali, il est essentiel que le mandat soit centré sur la protection des populations civiles et l’appui à l’établissement de l’autorité de l’Etat sur l’ensemble de son territoire », a affirmé le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, au siège de l’Onu, à New York.

Selon le chef de la diplomatie malienne, « il est indispensable de mieux définir et articuler la notion de protection des civils dans un contexte de guerre asymétrique ».

Poursuivant, il a invité la Minusma à « prendre en compte la montée en puissance des forces de défense et de sécurité, qui sont désormais en première ligne face aux groupes terroristes ». Ces exigences risquent de transformer considérablement la mission onusienne qui doit désormais se passer du soutien de la Force Barkhane.

« Dans le cadre du renouvellement sus-indiqué sur mandat de la Minusma et l’appui aérien de Barkhane, le Gouvernement du Mali exprime son opposition ferme à l’intervention sur son territoire de la Force Barkhane, après la décision unilatérale de retrait de ladite force et la dénonciation par le Mali des accords de défense avec la France », a rappelé Abdoulaye Diop le 13 juin, appelant « au respect de la souveraineté du Mali et des décisions prises par les autorités maliennes à cet égard ».

Il a assuré que Bamako mettra tout en œuvre pour assumer la responsabilité qui lui incombe d’assurer la sécurité du personnel déployé au Mali.

Fragile après le départ de Barkhane ?

Depuis l’annonce en juin 2021, du retrait de la France du Mali, les attaques contre les casques bleus ont connu une hausse.

Chercheur sénior à Armed Conflict Location and Event Data Project (ACLED), Héni Nsaibia affirme avoir dénombré 55 attaques, occasionnant une vingtaine de victimes (voir graphique). Mission onusienne qui a subi le plus de pertes en vies humaines, la Minusma a déploré 257 décès de casques bleus depuis 2013. Un chiffre qui risque d’aller crescendo si des alternatives ne sont pas trouvées à l’appui de la France.

Pour le Cabinet Amanar Advisor, « l’efficacité de la Minusma après le départ de Barkhane ne passe que par un renforcement ». Ce renforcement parait nécessaire avec la réquisition par l’Ukraine de ses six hélicoptères mis auparavant à la disposition de la Minusma.

Graphique représentant le nombre d’attaques et de morts subis par la Minusma

Dans ce contexte, la décision de l’Allemagne de « renforcer son contingent pour notamment assurer la protection de la plateforme aéroportuaire du Supercamp de Gao » est une bouffée d’oxygène. « Mais, des compétences vont rester en souffrance », reconnaît Amanar-Advisor qui fait allusion à « certaines fonctions supports critiques, comme le soutien sanitaire » qu’assurait Barkhane.

Mali : vers un nouveau chronogramme des élections ?

Le gouvernement de transition aurait prévu d’organiser une série de scrutins de mars 2023 à février 2024.Pour l’heure, aucune source officielle n’a communiqué sur un quelconque chronogramme des élections. Mais ce mardi, Malick Konaté, journaliste malien très suivi sur les réseaux sociaux notamment, a avancé des dates sur Twitter.

Selon lui, il y aura un référendum en mars 2023 et des élections territoriales trois mois plus tard. Toujours d’après M. Konaté, les Législatives sont programmés en octobre – novembre 2023 et la Présidentielle doit avoir lieu en février 2024.

A moins d’une semaine du Sommet extraordinaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), prévu le 3 juillet à Accra (Ghana), le Mali répondrait ainsi à l’une des exigences de l’organisation régionale si ces informations se confirment.

Dernièrement, Bamako avait demandé à la Cédéao un délai de 24 mois pour mener à bien la transition. L’organisation régionale, quant à elle, avait exigé que le processus soit bouclé entre 16 et 18 mois. 

Le 15 avril 2021, le premier gouvernement de transition, issu du coup d’Etat d’août 2020 ayant abouti à la démission de l’ex-président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), avait proposé un calendrier de transition. Celui-ci prévoyait le couplage des élections présidentielle et législatives le 27 février 2022. Avant cela, un référendum et des élections territoriales devaient respectivement se tenir le 31 octobre et le 26 décembre 2021.

Le calendrier n’a toutefois pu être respecté puisque le 24 mai 2021, le colonel Assimi Goïta et ses hommes vont perpétrer un autre coup de force en arrêtant notamment le président de la transition, Bah N’Daw et son Premier ministre, Moctar Ouane. Car la veille, un gouvernement avait été mis sur pied sans deux proches du chef des putschistes.

Moura : Amadou Koufa remet en cause la version de Bamako

Quatre mois après les accusations d’exactions de l’armée malienne à Moura (centre), le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM) donne sa version des faits.Un autre son de cloche a résonné sur les évènements controversés de Moura, un village du centre malien. Du 27 au 31 mars, plusieurs dizaines de personnes présentées comme des jihadistes y ont été tuées dans une opération des Forces armées maliennes (Fama), accompagnées d’éléments de la compagnie militaire privée controversée, Wagner.

Dans une vidéo de 2 minutes 50 secondes diffusée par « Az Zallaqa », l’organe médiatique du GSIM, une fédération d’organisations jihadistes affiliées à Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI), Amadou Kouffa, chef de la Katiba du Macina, déclare que, contrairement aux informations fournies par les autorités maliennes, les jihadistes qui étaient présents dans ce village du cercle de Djenné (centre) étaient au nombre de trente.

Au lendemain de cette opération, l’état-major général des armées maliennes (EMGA) avait affirmé avoir neutralisé « 203 combattants des GAT (Groupes armés terroristes) et interpellé 51 personnes ». « A cela, s’ajoute le bilan matériel de 200 motos brûlées et saisies », rapportait l’EMGA.

S’exprimant en arabe, le chef jihadiste, apparu sous un turban noir, accuse l’armée malienne et Wagner d’avoir tué « des centaines de civils musulmans » avec la complicité de certains habitants de Moura.

Des organisations de défense des droits de l’homme comme Human Right Watch avaient réclamé l’ouverture d’une enquête sur des allégations de meurtre de 300 civils ou suspects imputables aux Fama et à Wagner.

Quid de l’enquête de la Minusma ?

En réponse, l’armée malienne a qualifié ces allégations d’exactions sur les populations civiles d’« infondées ». L’État-major est ensuite revenu en détails sur l’opération, précisant que les militaires ont mobilisé des drones de surveillance et des hélicoptères pour d’abord « cerner la zone ».

L’armée soutient que les jihadistes qui tentaient de fuir la localité ont été interceptés et neutralisés par un Mi5, un de ses moyens aériens acquis récemment grâce au renforcement de sa coopération avec la Russie..

« Le contrôle total de la localité a permis de faire le tri, rechercher, identifier des terroristes déguisés et dissimulés parmi les populations civiles », tentait de démontrer l’armée malienne, reconnaissant dans la foulée avoir perdu des soldats sans en préciser le nombre.

La division des droits de l’homme de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) avait décidé de mener une « investigation » pour faire la lumière sur ce qui s’est passé à Moura. Mais à la date de la publication de la note trimestrielle (1er janvier au 31 mars) sur les tendances des violations et atteintes aux droits de l’homme au Mali, « la Minusma n’avait pas pu conduire une enquête in situ à Moura ».

Évoquant des raisons sécuritaires, les autorités maliennes se sont opposées à ce qu’une mission d’enquête de la Minusma se rende à Moura. Des discussions sont en cours pour lever cette « restriction » qui intervient dans un contexte de tension entre le Mali et ses partenaires internationaux.

Les militaires, qui avaient renversé Ibrahim Boubacar Keita en août 2020 et évincé le président de la transition et son Premier ministre neuf mois plus tard, ont fait appel à la compagnie russe controversée Wagner pour « reprendre l’initiative » dans les zones contrôlées par les jihadistes, même s’ils parlent, jusque-là, d’ « instructeurs russes ». Ce choix est justifié par la recherche d’une alternative au retrait de Barkhane décidé par le président français Emmanuel Macron et qualifié comme « un abandon en plein vol » par Bamako.

Promulgation de la charte révisée: vers une levée de l’embargo contre le Mali

Le président de la transition malienne a promulgué vendredi 24 juin la nouvelle loi électorale, un document controversé mais crucial pour la suite de la transition et une éventuelle levée de l’embargo de la Cedeao contre le pays.Les Maliens croisent les doigts. A une semaine de la tenue du sommet décisif des chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao), ils espèrent que les lourdes sanctions prononcées, le 9 janvier, contre leur pays seront cette fois levées ou fortement amoindries. L’organisation sous-régionale attendait depuis longtemps que les militaires au pouvoir présentent un calendrier de transition raisonnable en vue d’un rapide retour des civils au pouvoir. 

Mais au début de ce mois de juin, le colonel Assimi Goïta a unilatéralement prolongé la transition de deux ans, soit jusqu’à mars 2024. Si la Cedeao a « regretté » cette mesure prise en pleines négociations, cela n’a pas empêché à Goïta de poursuivre sa logique. Ainsi, il vient d’entériner le texte adopté par le Conseil national de transition (CNT), l’organe législatif, il y a une semaine, sur l’organisation des prochaines élections. Elles sont censées permettre le retour des civils au pouvoir depuis le coup d’Etat d’août 2020 contre le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta. C’est une condition longtemps posée par la Cedeao pour lever les sanctions sur le pays.

En promulguant la nouvelle loi électorale, le président de transition entérine donc les 92 amendements que le CNT avait imposés aux 219 articles du texte, au grand dam du gouvernement, auteur du projet. La nouvelle loi électorale compte toutefois des dispositions controversées comme celles concernant l’Autorité indépendante de gestion des élections, dont trois des quinze membres seront désormais nommés par Assimi Goïta lui-même. 

Assimi Goïta, candidat à la présidentielle ?

Il en est de même pour l’amendement attribuant au ministère de l’Administration territoriale la préparation technique des scrutins. Selon la société civile aussi, cette nouvelle loi va permettre aux militaires membres des actuelles autorités de transition, notamment le colonel Assimi Goïta, de se présenter à la prochaine élection présidentielle. Ils pourront le faire à condition de démissionner quatre mois auparavant.

En revanche, les autorités maliennes veulent montrer par cette loi électorale leur volonté de rendre le pouvoir aux civils à la fin de la transition et revenir à l’ordre constitutionnel. Elles avaient promis, qu’une fois cette loi mise en place, de présenter rapidement à la Cedeao un calendrier détaillé expliquant les étapes à traverser avant l’organisation des élections.

En attendant de voir si les nouvelles dispositions posées par le pouvoir malien vont convaincre l’organisation régionale lors de son sommet du 3 juillet prochain à Accra, au Ghana, le médiateur de la Cedeao pour le Mali a quitté hier Bamako après « une visite rapide, discrète et décisive ». L’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan, a notamment rencontré le colonel Assimi Goïta avec lequel il a eu « des entretiens fonctionnels ».

« L’équipe a noté les actions entreprises vers un calendrier de transition viable et la promesse des autorités maliennes de rester engagées dans les efforts de restauration de l’ordre constitutionnel dans le pays et la sous-région », a-t-il noté dans les réseaux sociaux. Goodluck Jonathan s’est également dit « convaincu » que « très bientôt, les populations maliennes se rendront compte du travail abattu par la Transition pour atteindre ce niveau de progrès réalisé dans sa marche », a ajouté l’Agence de presse malienne (Amap).

Éradiquer les coups d’Etat

De toute façon, sur le dossier malien, à cause de la survenue de beaucoup d’éléments nouveaux, les discussions risquent de tirer en longueur entre les dirigeants de la région comme cela fut le cas lors du précédent sommet du 4 juin. Ils n’étaient pas tous favorables, certains chefs d’Etat de pays anglophones surtout, à une levée des sanctions compte tenu des avancées politiques lentes au plan national.

Pour éviter une telle situation et aller au consensus prôné dans les décisions de la Cedeao, le président nigérien Mohamed Bazoum a rendu hier une visite officielle à son homologue ivoirien Alassane Ouattara pour « harmoniser leurs points de vue » sur les dossiers « délicats » du Mali, du Burkina Faso et de la Guinée, trois pays de la région dirigées par des juntes militaires. « Ce sont des pays avec lesquels nous voulons entretenir et développer des relations de confort, de confiance, mais souhaiter surtout que le processus démocratique avance et que les peuples de ces pays ne continuèrent pas de souffrir de l’environnement actuel », a dit M. Ouattara.

Il est clair ainsi que la majorité des dirigeants de l’organisation privilégient une sortie de crise. Pour eux, cela doit se faire sans que la Cedeao ne perde la face devant des militaires qui ont pris l’habitude de s’emparer facilement du pouvoir. Ils veulent poser un exemple fort à même de dissuader d’autres soldats qui seraient tentés par des idées de coups d’Etat dans la région ouest-africaine où les menaces sécuritaires fragilisent souvent des régimes démocratiquement élus.

Mali : plus de 60 terroristes neutralisés au centre (armée)

Une semaine après le massacre de 132 villageois dans le centre du pays, l’armée malienne affirme y avoir « neutralisé » 61 djihadistes.L’armée malienne mène la riposte. Dans un communiqué publié vendredi soir, elle déclare avoir neutralisé « 59 djihadistes » à Diallasougou. C’est dans cette zone du centre que « les priorités opérationnelles ont été orientées suite à l’attaque terroriste contre les populations dans la nuit du 18 au 19 juin », à laquelle a été attribuée la mort de 132 civils. Des « responsables » djihadistes figurent aussi parmi les personnes neutralisées lors de cette opération militaire, précise la même source.

Elle a également fait part de « deux terroristes guetteurs neutralisés » dans la zone de Mondoro (centre), en plus de « 8 suspects terroristes interpellés et mis à la disposition de la prévôté » dans le sud du pays, lors d’une opération distincte.

Le gouvernement malien a attribué à la Katiba Macina du chef djihadiste Amadou Kouffa le massacre des 132 civils à Diallassagou et dans deux localités des environs, dans le centre du pays qui est l’un des principaux foyers de violence qui ensanglante le Sahel depuis des années. Mais la Katiba Macina, affiliée au groupe djihadiste Al-Qaïda, a démenti avoir tué ces 132 civils, dans un communiqué authentifié vendredi par l’organisme américain SITE, spécialisé dans la surveillance des groupes radicaux.

Les évènements de Diallassagou constituent l’un des pires carnages de civils au Mali ces dernières années et la dernière tuerie en date d’une récente série d’attaques à travers le Sahel. Le Mali est plongé dans une profonde crise sécuritaire, politique et humanitaire depuis le déclenchement d’insurrections indépendantiste et djihadiste en 2012 dans le nord. La propagation djihadiste a gagné le centre et les pays voisins, le Burkina Faso et le Niger.

Inflation : l’Uemoa préconise la poursuite de la transformation structurelle des économies

L’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) n’échappe pas à la flambée des prix consécutive à la guerre en Ukraine.Dans la plupart des pays africains, les conséquences du conflit russo-ukrainien se font sentir. A cause des sanctions occidentales infligées à la Russie, les produits pétroliers sont de plus en plus rares. Cette situation a obligé plusieurs gouvernements du continent noir à revoir à la hausse les prix du carburant. L’inflation concerne également les denrées de première nécessité avec une menace réelle sur les ménages les plus pauvres.

Pour faire face à cet énième choc exogène qui remet en cause la reprise économique notée après deux années de pandémie de Covid-19, les ministres de l’Économie et des Finances des pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) ont mis en place un ensemble de mesures.

Le ministre togolais de l’Économie et des Finances, Sani Yaya, présidant la 2e réunion ordinaire du Conseil des ministres de l’organisation sous-régionale, a salué les décisions vigoureuses mises en œuvre par les États membres de l’espace communautaire pour contenir la progression de l’inflation et préserver le pouvoir d’achat des populations notamment les couches les plus vulnérables.

« Pour consolider les acquis et faire face durablement à ces défis, a plaidé le président en exercice du Conseil des ministres de l’Union, je voudrais encourager les États membres à poursuivre la mise en œuvre des actions visant la transformation structurelle de nos économies, la promotion de la production locale d’intrants agricoles, la promotion et la consommation des produits locaux ainsi que l’amélioration de l’offre de l’énergie ».

Au cours des travaux commencés ce vendredi, plusieurs textes dont le Projet de rapport semestriel d’exécution de la surveillance multilatérale de juin 2022 seront examinés par les ministres réunis au siège de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) à Dakar.

Les responsables des économies de la région adopteront aussi le projet de décision portant définition de l’agrégat recettes fiscales, celui portant définition et détermination du contenu de la masse salariale et le projet de règlement relatif à l’harmonisation de la réglementation pharmaceutique.

En outre, le projet de décision portant adoption des lignes directrices relatives à la réglementation des dispositifs médicaux sera adopté. Il en sera de même pour le projet portant adoption des lignes directrices relatives à l’harmonisation de la réglementation des aliments destinés aux nourrissons et aux enfants en bas âge et des produits diététiques et de régime ainsi que le projet de décision portant adoption du schéma type d’institutionnalisation du genre dans les États membres de l’Union.

Loi électorale : vers une nouvelle tension entre Bamako et la Cedeao ?

L’adoption d’une nouvelle loi électorale au Mali risque de semer les germes d’un nouveau bras de fer entre les autorités de la transition malienne et la Cedeao.La nouvelle loi électorale va-t-elle reléguer au second plan le débat sur la durée de la transition malienne ? Adoptée vendredi 17 juin 2022 par le Conseil national de transition (CNT), cette loi est interprétée par certains observateurs comme une volonté des militaires, actuellement aux affaires après un double putsch, de rester au pouvoir à la fin de la transition.

Exposé au Conseil national de transition (CNT) vendredi 17 juin, l’article 164 permet notamment aux membres des forces armées ou de sécurité qui le désirent de concourir aux prochaines élections présidentielles à condition de démissionner ou d’aller à la retraite au moins six mois avant la fin du mandat en cours du président de la République.

Au sein de l’organe législatif de la transition, le sujet a fait l’objet de discussions et l’article en question a été amendé avant son adoption par la majorité des conseillers en attendant une promulgation de la loi électorale par le chef de l’Etat, le Colonel Assimi Goita.

« Cependant pour les élections pendant la transition, les membres des Forces armées ou de sécurité qui désirent être candidats doivent démissionner ou demander leur mise à la retraite au moins quatre (04) mois avant la date de l’élection présidentielle », précise l’article 155 (ancien 164) dans son deuxième paragraphe.

En lisant cette disposition, un enseignant chercheur malien, préférant garder l’anonymat, « se pose des questions sur les intentions réelles des militaires au pouvoir ».

« En mon sens, l’article 155 de la loi électorale est très clair dans la mesure où il contribue à ancrer dans l’imaginaire collectif, l’éventualité d’une candidature de l’un des membres de l’ex-Conseil national du Salut du Peuple (CNSP) lors des prochaines élections présidentielles », estime Yannick Houphouët Kouablan, responsable du bureau veille et analyse de risques du cabinet de conseil en sûreté, ISAO au Sénégal.

Cependant, cet analyste laisse de la place à une autre interprétation de la nouvelle loi. A l’en croire, il ne faut pas écarter la possibilité qu’elle soit une alternative pour les militaires au pouvoir, au cas où « ils n’auraient pas pu identifier un profil civil en mesure de préserver leurs intérêts au terme de la période de transition ».

En essayant d’ouvrir une brèche pour donner la possibilité à l’un des leurs d’être candidat à la présidentielle, les militaires risquent de favoriser l’établissement d’un climat de méfiance entre la junte et la classe politique malienne. Au même moment, la composition de l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE), l’autre nouveauté de la loi électorale qui est au centre, ne fait pas l’unanimité.

L’article 7 de la loi électorale dit que le collège, organe délibérant est composé de quinze (15) membres désignés par les pouvoirs publics, les partis politiques et la société civile. La majorité, à savoir huit des membres sont nommés par les pouvoirs publics contre sept pour les formations politiques et les organisations de la société civile.

Selon l’enseignant-chercheur malien qui a préféré taire son identité, l’éventuelle participation des militaires actuellement au pouvoir aux prochaines élections « peut peser sur la crédibilité des élections à venir ».

De son côté, Yannick Houphouët Kouablan redoute « un accroissement des tensions entre le Mali et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) ». C’est d’autant plus prévisible que dès le lendemain du coup d’Etat d’août 2020, les chefs d’Etat de la Cedeao avaient tenu à ce qu’il soit mentionné dans la charte de transition que les militaires auteurs du putsch ne seraient pas capables de se présenter aux élections. Une disposition maintenue et même renforcée durant la révision de la charte en février 2022.

Mis devant le fait accompli comme cela est déjà le cas sur la durée de la transition fixée à 24 mois à compter du 26 mars 2022 alors que la conférence des chefs d’Etat qui n’a pu trouver un consensus le 4 juin a décidé de trancher le 3 juillet prochain à l’occasion d’un sommet extraordinaire de la Cedeao, l’énigme est de savoir quelle sera l’attitude l’institution régionale ? Quelle sera la réponse de Bamako en cas de maintien des sanctions économiques et financières au sortir de cette session ?

« Il est clair que le Mali est dans une phase de remise en question et de rejet de plusieurs équilibres : dénonciation des accords de défense le liant avec la France, demande du retrait des soldats de Barkhane du territoire malien, retrait des instances du G5-Sahel et notamment de sa force conjointe etc. », reconnaît Yannick Houphouët Kouablan. « Néanmoins, je ne pense pas que les autorités maliennes de la transition adoptent une posture radicale au point de se retirer de la Cedeao », espère-t-il.

Son homologue malien invite les autorités de Bamako « à ne pas écouter la rue qui les pousse vers une telle décision ». Pour lui, « le Mali est condamné à rester au sein de la Cedeao pour son propre intérêt ». « Sur le plan politique, un éventuel retrait du Mali de la Cedeao renforcerait son isolement sur la scène internationale », prévient Yannick Houphouët Kouablan.

Mali: les morts de l’attaque de Bankass indignent la toile

Le premier bilan officiel des attaques perpétrées ce week-end dans le centre du pays « fait état de 132 civils froidement tués par les combattants de la Katiba du Macina de Amadou Kouffa », informe le gouvernement malien.Au Mali, les jours passent et « l’horreur se poursuit », déplore Medhy Medhy sur son compte Twitter. Dans la nuit du samedi 18 juin au dimanche 19 juin, plus de 130 personnes ont en effet été tuées à Diallassagou et dans deux autres localités du cercle de Bankass « par les combattants de la Katiba du Macina de Amadou Kouffa », organisation affiliée à Al-Qaïda.

Cet énième massacre a provoqué une onde de choc auprès de plusieurs internautes qui dénoncent entre autres l’impuissance des militaires au pouvoir à Bamako d’enrayer ce cercle de violence. « La fanfaronnade et l’incapacité notoire d’Assimi Goïta et ses copains militaires de bureau à défendre le Mali étalées, une fois de plus. Obnubilés qu’ils sont par le luxe du pouvoir, le Mali subit pire que sous le régime civil. 132 autres civils tués sous le règne militaire », peste sur Twitter Bakary Bamba.

« Ça fait déjà combien d’années qu’ils sont au pouvoir ces supposés défenseurs de la Nation ? », s’interroge Papis Toorey à qui Mohamed Sidibé rétorque : « Ils (les militaires) veulent juste confisquer le pouvoir. Et après le populisme et la propagande sont leurs punchlines ».

Lassé par tant de drames, Youssouf Bakayoko se demande quant à lui : « À quand la fin ? ». Difficile de trouver une réponse à cette question tant la situation s’est fortement dégradée ces dernières années.

Christian Zan, doctorant en droit international sur la Cybersécurité, estime toutefois que « l’aide de l’armée française et de toutes autres forces nationales est souhaitée. Car, le Mali, en l’état actuel de son armée, n’est pas capable de faire face à l’ogre terroriste ».

Depuis 2011 et la chute du guide Libyen Mouammar Kadhafi dans le sillage des printemps arabes, le Mali est confronté à une grave crise sécuritaire. L’arrivée au pouvoir d’un groupe d’officiers mené par le Colonel Assimi Goïta après un premier coup d’état ayant renversé le président Ibrahim Boubacar Keita (IBK) en août 2020 et un second coup de force, fin mai 2021, actant la mainmise totale des militaires sur Bamako, n’a pas permis d’améliorer la situation. 

Le soutien en équipement et en combattants fournis aussi par la Russie n’a pas non plus donné les résultats escomptés. Les dernières sorties des Forces armées maliennes appuyées par les combattants du groupe de sécurité privé russe Wagner ont d’ailleurs été accompagnées de plusieurs exactions et massacres de civils.

G5 Sahel : Pourquoi le Mali a retiré ses troupes ?

Moins d’un mois après sa décision de quitter le G5 Sahel, le Mali a désengagé ses forces de la Force Conjointe.En annonçant le 15 mai dernier son retrait des instances du G5 Sahel, Bamako ne bluffait pas. Mardi 14 juin, les autorités de la transition de Bamako ont annoncé mettre fin à « l’engagement des personnels maliens en service au sein des fuseaux ouest et centre pour compter le 30 juin ». Une démarche qui s’inscrit « dans le cadre de la mise en par le respect de la décision prise par Bamako le 15 mai de de son retrait de toutes les instances du G5 Sahel, y compris la Force Conjointe du G5 Sahel », précise une lettre du chef d’Etat-major des armées maliennes adressée au Commandant de la Force Conjointe du G5 Sahel. Cette organisation régionale qui regroupe le Mali, le Burkina-Faso, le Niger, le Tchad et la Mauritanie, lancée en 2014 pour combattre les groupes jihadistes présents dans le Sahel.

Créée, elle en 2015, la Force conjointe (FC) était jusqu’ici constituée de sept bataillons comptant chacun 650 hommes (550 militaires, 100 policiers et gendarmes) répartis sur trois fuseaux : Ouest (Mali –Mauritanie), Centre (Mali, Burkina Faso et Niger) et Est (Niger –Tchad).

Cette force est chargée de combattre le terrorisme, le trafic de drogue, les trafics d’êtres humains avec un droit de poursuite de part et d’autre des frontières. Une possibilité dont se prive désormais Bamako en se retirant du G5 Sahel et de sa force conjointe.

Jeudi 19 mai, le président en exercice du G5 Sahel, le Général Mahamat Idriss Deby Itno du Tchad avait invité les autorités de la transition à reconsidérer leur position.

Jugeant injustifiée la décision du Mali, la Mauritanie avait promis « de mettre tout en œuvre pour que le G5 Sahel surmonte tous les obstacles qui se dressent devant lui ». Vendredi 20, Nouakchott avait dépêché son ministre des Affaires étrangères, de la Coopération et des Mauritaniens de l’Extérieur, Mohamed Salem Ould Merzoug à Bamako.

Le Niger n’a pas jugé nécessaire de faire des efforts pour sauver les meubles. Niamey a préféré acter la mort du G5 Sahel qui vient de prendre effet avec le retrait des militaires maliens des cinq des sept fuseaux et du poste de commandement (PC) de Bamako. Selon le document du chef d’état-major malien, les militaires rappelés reprendront service « dans leurs armées à compter du 1er juillet ».

Le Mali a décidé de se retirer du G5 Sahel en raison de ce que son gouvernement a qualifié de « manœuvres » visant  à l’empêcher d’assurer la direction de l’organisation régionale à partir de février 2022, date à laquelle il devait théoriquement hériter de cette charge en vertu du principe de la présidence tournante consacré par les textes fondamentaux de cette entité.

A lire aussi : Pourquoi le Mali se retire du G5 Sahel?

Théâtre d’un premier coup d’état en août 2020 quand un groupe de jeunes officiers a démis le président Ibrahim Boubacar Keita (IBK), le Mali est aujourd’hui dirigé par un gouvernement de transition dominé par les militaires qui a été installé au lendemain de la déposition, fin mai 2021, du président Bah N’daw et de son premier ministre Moctar Ouane alors chargés d’organiser le retour du pays vers l’ordre constitutionnel.

Contrairement au putsch contre IBK qui a été très peu désapprouvé par les partenaires du Mali, le second coup d’État a été largement condamné et a provoqué une nette dégradation des relations entre Bamako et la communauté internationale.

Après la France qui avait d’abord menacé puis décidé de retirer ses troupes engagées dans la lutte anti-jihadiste au Mali, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a prononcé plusieurs sanctions contre Bamako, dont un embargo économique et financier ainsi que la fermeture des frontières aériennes et terrestres avec le pays.

Bamako qui soupçonne une puissance « extrarégionale », en clair la France, d’être derrière ces sanctions n’a pas apprécié « le manque de solidarité » de pays du G5 Sahel que certains cercles du pouvoir malien accusent d’être à la solde de Paris qui s’est montré moins exigeant avec le Tchad où des militaires ont pris le pouvoir de manière anticonstitutionnelle, après le décès, le 20 avril 2021, du Maréchal Idriss Deby Itno.

Mali : que cache l’arrestation du chef jihadiste Oumeya Ould Albakaye

Pendant qu’elle se retire du Mali, la France arrête un chef jihadiste lié à l’Etat islamique.Que cherche à prouver la France ? Alors que ses forces se retirent progressivement du Mali, elle continue de mener des opérations militaires dans ce pays sahélien, malgré la demande formulée par la junte au pouvoir de retirer ses troupes « sans délai ».

Dans la nuit du 11 au 12 juin, l’armée française affirme avoir arrêté Oumeya Ould Albakaye, un « haut responsable » de l’Etat islamique au Sahel, anciennement appelé Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS).

L’Etat-major des majors des armées françaises précise dans un communiqué publié mercredi 15 juin, que l’opération ayant permis de capturer ce « haut responsable » de l’Etat islamique au Sahel l’EIS à la frontière malo-nigérienne, est le résultat d’une traque de plusieurs semaines dans laquelle différentes capacités aériennes et des unités terrestres ont été mobilisées.

Selon le journaliste Wassim Nasr, spécialiste des mouvements jihadistes, Oumeya Ould Albakaye a été arrêté en compagnie de trois autres personnes dans un campement à Labzanga, non loin de la frontière avec le Niger.

Chef de l’Etat islamique au Sahel dans le Gourma, au Mali et pour l’Oudalan, au nord du Burkina Faso, Oumaya Ould Albakaye est le successeur d’Abdel Hakim al Sahroui, mort des suites d’une maladie.

Il est décrit comme le planificateur de plusieurs attaques contre différentes emprises militaires au Mali, dont celles de Gao. « Il dirigeait des réseaux de mise en œuvre d’engins explosifs improvisés. Responsable d’un grand nombre d’exactions et d’actions de représailles menées par l’EIGS par l’EIGS (Etat islamique au Sahel depuis mars 2022) », ajoute le communiqué de l’EMA.

Mais quel cachet faut-il donner à cette arrestation annoncée au lendemain de la rétrocession par les forces françaises de la base de Ménaka aux Fama ? Chercheur à l’Université de Bayreuth, en Allemagne, Adama Sandor décrypte cette intervention française en la reliant à l’incapacité de l’armée malienne à porter des coups d’envergure contre les groupes jihadistes dans la région des trois frontières. Pour le chercheur, c’est un message subliminal lancé à Bamako pour lui signifier qu’elle a encore besoin des services de ses partenaires internationaux dans cette région devenue l’un des repères des insurgés islamistes.

L’Etat-major des armées célèbre un « succès » en espérant qu’il déstabilisera à nouveau le haut commandement de l’EIGS (actuel EIS) dans la zone des trois frontières ». Le même groupe avait été la cible de plusieurs opérations de Barkhane, ayant abouti à l’arrestation de nombre de ses cadres et à la neutralisation d’Adnan Abou Walid al Sahraoui, au mois d’août 2021. Ces actions avaient pour objectif d’affaiblir le groupe jihadiste né en 2015 des flancs d’Al Mourabitoune, alors sous le commandement de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar.

Cependant, celui-ci, promu 7e province de l’Etat islamique en Afrique, sous l’impulsion de son défunt commandant en chef, Abou Al Bara al Sahraoui, multiplie depuis mars les offensives dans le nord-est du Mali, où des affrontements sont régulièrement signalés entre ses combattants et les mouvements touaregs pro-gouvernementaux. Ces affrontements auraient fait 264 victimes civiles, selon les autorités locales citées par la note trimestrielle de la Minusma.

Mali : le mandat de la Minusma en discussion à l’Onu

Le Conseil de sécurité de l’Organisation des nations unies (Onu) examine, ce lundi 13 juin, la prolongation du séjour des Casques bleus dans ce pays sahélien confronté au jihadisme.Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) expire ce 30 juin. Il avait été allongé d’une année supplémentaire à la faveur de la résolution 2584 adopté à l’unanimité par les membres du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Actuellement, la question du maintien ou non de la Minusma, mise en place le 25 avril 2013, pour appuyer le processus politique et effectuer des tâches sécuritaires au Mali, se pose avec acuité. Car la France n’est plus en odeur de sainteté dans ce pays dirigé par une junte. Ces derniers mois, les relations entre Bamako et Paris se sont dégradées. Le Conseil de sécurité des Nations Unies va se prononcer par vote le 29 juin prochain.

Sahel : pourquoi les humanitaires sont ciblés ?

La région, confrontée à la menace jihadiste, est de moins en moins sûre pour les travailleurs humanitaires.C’était un mercredi noir. Le 1er juin dernier, vers 18 heures, une équipe de la Croix-Rouge a essuyé des tirs d’hommes armés à bord de motos sur l’axe Koussané-Kayes, dans l’Ouest du Mali. Parmi les quatre membres du groupe, revenant d’une visite de terrain, le chauffeur malien et un humanitaire sénégalais sont tués.

Un drame qui relance le débat sur la sécurité des travailleurs humanitaires. Pourtant, « le droit international humanitaire prévoit clairement la protection du personnel sanitaire et des personnels de secours en temps de conflit. C’est d’ailleurs sa raison d’être. La première Convention de Genève adoptée en 1864 visait à protéger les blessés et ceux qui leur viennent en aide », rappelle le spécialiste Julien Antouly dans un entretien avec APA.

Dans le temps, cet arsenal juridique a beaucoup évolué, mais l’article 3 commun aux quatre conventions de Genève « octroie au Comité International de la Croix-Rouge (CICR), ainsi qu’aux autres organismes humanitaires impartiaux, le droit d’offrir leurs services aux parties au conflit ».

Partout où il y a des combats dans le monde, des organisations humanitaires s’emploient à remplir cette mission essentielle. « Au Sahel, la Croix-Rouge intervient aussi bien en matière de secours d’urgence que dans le cadre de projets de programmes de développement. Elle assiste les populations fragilisées par les crises sanitaires, les catastrophes, l’insécurité alimentaire et nutritionnelle, les inégalités et le changement climatique », précise Moustapha Diallo, chargé de communication de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) pour la région.

Directeur Général de Médecins Sans Frontières (MSF), Thierry Allafort explique qu’il y a un fort besoin de soins au Niger, au Mali, au Burkina et au Nigeria dans une moindre mesure. A l’en croire, dans la conduite de leurs missions, les travailleurs humanitaires ont toujours rencontré des risques.

« Mais l’aspect nouveau et particulièrement choquant des tragédies de ces dernières années est que des personnes ont été délibérément tuées bien qu’elles étaient clairement identifiées et connues en tant que membres du personnel de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, des Nations Unies ou d’Organisations Non Gouvernementales (ONG) », alertait le CICR en 1998, à l’occasion de la première réunion périodique sur le droit international humanitaire.

Une vingtaine d’années plus tard, le constat est toujours amer. Faute d’éléments suffisants accréditant la thèse de la préméditation, M. Diallo ne veut pas verser dans la spéculation, mais n’en déplore pas moins les attaques contre les travailleurs humanitaires.

« Dans de nombreuses régions où nous intervenons, être des cibles des terroristes et des milices d’auto-défense est une donnée avec laquelle nous devons composer. Il me semble que nous avons du mal à reconnaître cet état de fait », admet Thierry Allafort.

Cette tendance est confirmée par les statistiques de la base de données sur la sécurité des travailleurs humanitaires (AWSD, sigle en anglais). Rien qu’en 2020, elle a recensé 283 attaques contre 276 l’année précédente. Au total, ces assauts survenus dans 41 pays ont fait 484 victimes, entraîné la mort de 117 personnes et causé des blessures à 242 individus. A cela s’ajoute, 125 enlèvements.

Au Mali et au Burkina, en 2021, la même base de données a dénombré 52 incidents sécuritaires avec un fort taux d’enlèvements d’humanitaires. Pour la majorité des cas, les auteurs ne sont pas déterminés même si les groupes armés non étatiques sont souvent pointés du doigt.

Le 9 août 2020, six jeunes humanitaires de l’ONG ACTED ont été assassinés avec leur chauffeur et leur guide nigériens dans la Réserve de girafes de Kouré, à 60 kilomètres au Sud-Est de Niamey (Niger). Une atrocité revendiquée par la branche sahélienne de l’Etat Islamique.

Revirement

Il y a dix ans maintenant, l’action humanitaire était acceptée par les jihadistes contrôlant le Nord du Mali. Chef de la Sous-Délégation du CICR dans cette zone de novembre 2011 à novembre 2014, Attaher Zacka Maïga se souvient de sa rencontre avec Mokhtar Belmokhtar, dirigeant de la brigade Al Moulathamoune en rupture de ban à l’époque avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

« Je lui ai demandé pourquoi il a voulu discuter avec des responsables du CICR. Il a dit qu’il était au courant de notre travail et qu’il s’était déjà entretenu avec des responsables humanitaires en Afghanistan en 1990. Il a déclaré que nous étions une organisation crédible et sérieuse », a récemment témoigné M. Maïga dans la revue internationale de la Croix-Rouge.

Aujourd’hui, « les choses sont très différentes. Il existe une pléthore de groupes armés opérant au Mali avec parfois des agendas et ambitions peu clairs. Le travail humanitaire est plus difficile qu’il ne l’était en 2012 », regrette-t-il. De tous temps, argumente M. Allafort, « les négociations sont compliquées quand il y a plusieurs acteurs armés » sur le terrain.

Le document préparatoire du CICR pour la première réunion périodique sur le droit international analyse cette situation à travers la nature changeante des conflits : « La protection du personnel humanitaire expatrié et national relevait essentiellement de la responsabilité des parties au conflit. Celles-ci n’escortaient pas les équipes humanitaires, mais les laissez-passer et les autorisations fonctionnaient relativement bien. Car le système était basé sur une chaîne de commandement claire ».

De nos jours, l’action humanitaire peut être perçue comme « une entrave aux objectifs ultimes des parties au conflit ». Accusés de vouloir « évangéliser » les autochtones, Béatrice Stockly et Cecilia Narvaez Argoti, des missionnaires suisse et colombienne, ont respectivement été enlevées en janvier 2016 et en février 2017 au Mali. La première nommée a perdu la vie dans cette mésaventure.

Pour les groupes armés, le kidnapping d’humanitaires peut également être une source de revenus. Capturée à Gao, au Mali, où elle dirigeait une ONG d’aide à l’enfance, la Française Sophie Pétronin a recouvré la liberté en octobre 2020 en même temps que l’homme politique malien, feu Soumaïla Cissé et deux Italiens. En contrepartie, les autorités maliennes ont relâché plus de 200 membres présumés du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (Gsim) et auraient payé une rançon.

Tout compte fait, selon M. Antouly, le bouclier le plus efficace, « c’est de se montrer utile, neutre et impartial » sur le théâtre des opérations. « Discuter avec tout le monde, se rapprocher des communautés et adapter les opérations au contexte sécuritaire », ajoute le Directeur Général de MSF, permet de minimiser les risques. Cela dit, les organisations humanitaires ont toujours la possibilité de se retirer des zones de conflits lorsque les conditions ne sont plus réunies pour garantir la sécurité de leur personnel.

Mali : les prémices d’une nouvelle Constitution

Après une prorogation de deux ans de la durée de la transition à partir de mars 2022, la junte veut rédiger une autre loi fondamentale pour un nouveau Mali.C’est une décision majeure. S’appuyant sur une loi du 25 février 2022 portant révision de la charte de la transition, le colonel Assimi Goïta a décrété la création d’une commission de rédaction d’un avant-projet de Constitution dans le cadre de la refondation de l’Etat.

Ladite commission, qui comprend un président, un rapporteur général, un rapporteur général adjoint, des experts et un personnel d’appui, doit remettre « un rapport de fin de mission ». Laquelle n’excédant pas deux mois.

Dans son travail, la commission peut solliciter « l’ensemble des forces vives de la nation » et doit faire « un point tous les 15 jours ou en cas de besoin au président de la transition ». Mais à peine publié, le décret suscite un débat dans l’opinion publique malienne.

Sur Twitter, le journaliste Séga Diarrah met déjà en garde contre une « modification » portant les germes « d’une partition du Mali », notant que « la Constitution de 1992 a été rédigée avec le sang des Maliens ».

Pour cet homme public très suivi, « la transition doit juste se concentrer sur l’organisation des élections ». Dès les premières heures de la transition, un projet de rédaction d’une nouvelle Constitution, à laquelle était associé Tony Blair Institute for Global Change (TBI), du nom de l’ancien Premier ministre britannique, a fait son bonhomme de chemin.

Cependant, le deuxième coup d’Etat du 24 mai 2021, ayant propulsé sur le devant de la scène Choguel Maïga, a donné un coup d’arrêt à ce processus. Nommé chef du nouveau gouvernement par le Colonel Assimi Goïta, le président du comité stratégique du Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5 – RFP) s’est prononcé contre l’implication d’étrangers dans la rédaction de la Constitution malienne.

Si on suit la logique du remplaçant de Moctar Ouane à la primature, l’expertise nationale doit être privilégiée pour ce qu’il considère comme une question de souveraineté. Un argument auquel la junte tient à cœur.

Une chose est sûre, ce projet de rédaction d’une nouvelle Constitution risque de provoquer des grincements de dents au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). L’organisation régionale doit se réunir le 3 juillet prochain pour discuter de la situation politique au Mali.

Crise malienne : un compromis est encore possible (Macky Sall)

Une issue favorable au bras de fer opposant Bamako à la Cédéao est toujours envisageable selon le président en exercice de l’Union Africaine (UA).Le divorce n’est pas consommé entre le Mali et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Dans un entretien accordé ce jeudi à RFI et France 24, Macky Sall a affirmé que ce différend peut bel et bien connaître un dénouement heureux.

« Nous avons demandé au médiateur de mettre à profit ce mois-ci pour remplir la feuille de route qui nous permettra d’avoir les différents engagements et les échéances. Le 3 juillet prochain, nous pourrons valablement délibérer sur la levée ou pas des sanctions. Un compromis est encore possible », a expliqué le chef de l’Etat sénégalais.

Poursuivant, il a estimé que c’est « maladroit » de la part de la junte malienne de publier le décret fixant la transition à deux ans à partir de mars 2022 juste après le Sommet d’Accra, au Ghana. Toutefois, le président en exercice de l’Union Africaine (UA) a renseigné que ce calendrier était « le produit d’un accord » entre Bamako et le médiateur de la Cédéao, Goodluck Jonathan.

« Nous verrons d’ici juillet si les conditions sont réunies pour que la Cédéao lève les sanctions qui impactent difficilement les populations maliennes », a indiqué le successeur de Félix Tshisekedi.

Abordant le cas de la Guinée, Macky Sall a fait savoir « qu’aucun de nos pays n’a intérêt à s’éloigner de son voisinage immédiat et de sa communauté ». Face à la défiance des juntes à l’égard de la Cédéao, le président sénégalais a pointé du doigt le soutien des militaires par des pays disposant du droit de veto au Conseil de sécurité des Nations Unies.

C’est pourquoi, a-t-il analysé, ces juntes refusent de faire ce que la Cédéao leur dicte. Partant de là, Macky Sall a considéré qu’il est temps de revoir le fonctionnement de la gouvernance mondiale. Car, pour lui, « nous ne pouvons pas apporter des réponses concrètes aux situations de nos pays » avec la composition actuelle du Conseil de sécurité.

Cédéao : l’indécision n’est pas synonyme de scission (expert)

Un consensus aurait pu être trouvé par les dirigeants ouest-africains réunis en sommet le 4 juin dernier à Accra, au Ghana, d’après Gilles Yabi, fondateur et directeur exécutif du think tank Wathi, interrogé par APA.Faute de consensus, les chefs d’Etats de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont renvoyé au 3 juillet leurs décisions sur les juntes. Comment analysez-vous cela ?

Il faudrait peut-être leur demander l’explication de cette non-décision. Je note cependant que cela n’améliore pas l’image très dégradée de l’organisation régionale au sein des opinions publiques ouest-africaines.

Comme un sommet a été annoncé, nous nous attendions donc à ce que des décisions soient prises, en particulier la levée des sanctions infligées au Mali. C’est regrettable qu’il n’y ait pas eu un travail technique et diplomatique qui aurait permis d’avoir un consensus avant la rencontre des présidents.

Les diplomates, ayant l’expérience de ce type de réunions, expliquent qu’il y a généralement un travail préalable qui permet de faire en sorte que les chefs d’Etats viennent simplement valider des orientations ou décisions quasiment prises. Mais là, nous avons l’impression qu’à chaque sommet il y a beaucoup de discussions et une absence de consensus qui auraient pu être anticipées.

Cette situation pointe les problèmes dans la manière dont les gouvernants au plus haut niveau de l’organisation régionale décident. Cela étant dit, le sommet ne devait pas se pencher seulement sur le Mali, mais aussi sur le Burkina et la Guinée. De ce fait, il est aussi dit que le sommet du 3 juillet permettrait d’avoir des décisions plus cohérentes sur les trois dossiers chauds de la région au plan politique.

Mais il y a un sentiment de gâchis, de mauvaise organisation de la Cédéao. En l’absence de l’assurance d’un consensus et d’une prise de décisions, il aurait fallu prendre le temps de lever tous les obstacles pour être sûr d’avoir un accord avec le Mali et les autres pays avant de convoquer un sommet.

A Accra,
deux camps se sont opposés sur le maintien ou non des sanctions. Peut-on parler de scission au sein de l’organisation régionale ?

Il y a effectivement des sources selon lesquelles des pays n’étaient pas d’accord avec les autres. Pour autant, je ne pense pas qu’il faille parler de scission. On n’en est pas là même s’il y a des divergences et des points de vue probablement tranchés de quelques chefs d’Etat.

En Afrique de l’Ouest, on note des problèmes de fond, des divergences dans l’interprétation des différents évènements politiques notamment les coups d’Etat (ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, dans quelle mesure doit-on prendre en compte la situation spécifique de chaque pays…).

C’est beaucoup d’éléments qui entrent en ligne de compte. Malgré tout, je ne pense pas que cela induise nécessairement une forme de scission au sein de la Cédéao.

Il faut aussi savoir qu’il y a, au niveau des chefs d’Etat, des calculs justifiés par leurs propres positions : ceux qui sont en fin de second mandat et ceux qui dirigent des pays où il y a une tradition d’alternance assez bien établie et où les partis sont beaucoup plus organisés. Des différences de configuration et de pratique politiques dans les pays de la région expliquent les décisions ou les prises de positions antagonistes.

Bamako a fixé à deux ans la période transitoire. A quoi peut-on s’attendre de la Cédéao suite à cette décision unilatérale ?

Le décret du président Assimi Goïta a fait le tour du monde et des réseaux sociaux. Il est arrivé juste après le sommet de la Cédéao. Est-ce que cela va influer sur le prochain sommet ? Probablement pas.

Jusque-là, il y avait des discussions sur le délai de la transition qui paraissait comme l’élément central du désaccord entre la Cédéao et le Mali. Avec ce décret, Bamako met clairement tout le monde devant le fait accompli.

Dans le cas de la Guinée et du Burkina, il est bon de rappeler que nous avons des institutions de transition qui ont annoncé des durées de transition ne correspondant pas à ce qui était souhaité par l’organisation régionale.

Quoi qu’il en soit, lors du prochain sommet de la Cédéao, la stabilité politique et sécuritaire de la région est à placer au cœur des décisions. On doit privilégier l’intérêt supérieur des populations.

Mais cela suppose que nous sortions d’une logique de confrontation et que nous réussissions à restaurer une culture de la discussion, de la présence sur le terrain qui permet d’orienter les transitions dans la bonne direction.