Nigeria : ce que l’on sait de l’attaque de la prison de Kuje

L’assaut mené contre cet établissement pénitencier à la périphérie d’Abuja a été revendiqué par l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap, sigle en anglais).« Prison Break (célèbre série américaine) est à Abuja », a ironisé un internaute nigérian en parlant de la rocambolesque attaque de l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap, en anglais) contre la prison de Kuje, dans la capitale fédérale du Nigeria.

Entre mardi et mercredi, des combattants de ce groupe terroriste ont assiégé cette maison d’arrêt pour y libérer 879 détenus dont des jihadistes majeurs. Parmi eux figurent des membres de Jamaat Ahl Al-Sunnah Lil Dawa Wal Jihad (JASDJ), l’une des factions issues de la scission de Boko Haram, affirme secmxx, le pseudonyme sur Twitter d’un membre de la communauté du renseignement open source du Nigeria.

Selon lui, « les assaillants, composée de trois groupes d’assaut, chacun avec une tâche spécifique, sont venus de leur bastion du Nord-Est ». L’attaque, d’une durée de trois heures d’après des sources médiatiques, a « nécessité un nombre important d’hommes », explique Vincent Foucher, observateur de la politique ouest-africaine et des mouvements jihadistes.

Au moins 443 des 879 évadés sont toujours portés disparus, mais des centaines d’autres ont été arrêtés, a déclaré Umar Abubakar, porte-parole du Service correctionnel nigérian. Il a également indiqué qu’un garde pénitentiaire et trois policiers sont morts dans l’assaut.

Ces derniers temps, plusieurs spécialistes du jihadisme ont minimisé les capacités de nuisance de l’Iswap. Mais pour M. Foucher, l’actualité « montre clairement que malgré tout ce que certains ont tenté de faire croire, il reste une menace sérieuse et audacieuse et doit être traité comme telle ».

L’offensive contre cette prison située non loin de l’aéroport d’Abuja est survenue à quelques jours de la célébration de l’Aïd El-Kébir. A cette occasion, on note des déplacements massifs de populations des villes vers les villages pour célébrer la fête musulmane en famille. Ainsi, les jihadistes ont parcouru « de longues distances » sans éveiller de soupçons, argumente secmxx. Ce dernier se demande désormais quel sort sera réservé aux membres de JASDJ.

Les affrontements pour le contrôle de plusieurs territoires, notamment les terres fertiles aux alentours du lac Tchad, font rage entre les deux groupes terroristes. « Qu’ont-ils fait ou que feront-ils des détenus non affiliés à l’Iswap ? Des noms assez importants. Les ont-ils tués ou vont-ils les tuer ? Peuvent-ils s’engager avec eux, travailler à une sorte d’unité ? », s’interroge Vincent Foucher.

En tout cas, la facilité déconcertante avec laquelle les jihadistes se sont emparés de cette prison de moyenne sécurité a provoqué l’ire du président Muhammadu Buhari également insatisfait du système de renseignement. Il y a moins d’une année, une attaque à l’explosif d’une prison du Sud-Est du pays, en proie à des agitations séparatistes, avait permis à plus de 1800 détenus de disparaître dans la nature.

Mali : deux Casques bleus tués dans l’explosion d’une mine

Un véhicule blindé d’un convoi logistique de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) a heurté ce matin un engin explosif dans le Nord du pays.Un terrain miné. Au Mali, les groupes jihadistes posent des engins explosifs sur les voies empruntées par les Forces de défense et de sécurité maliennes, mais aussi par les Casques bleus.

Ce mardi, sur l’axe Tessalit-Gao, une voiture transportant des éléments de la force de maintien de la paix onusienne a sauté sur une mine. « Selon un premier bilan, deux Casques bleus ont succombé à leurs blessures et cinq autres ont été grièvement blessés suite à l’explosion. Une force d’intervention rapide a été envoyée sur les lieux et les blessés ont été évacués », a déclaré la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) dans un communiqué reçu à APA.

Après avoir fermement condamné cette attaque, la Minusma a souligné qu’elle « peut constituer un crime de guerre ». Poursuivant, la mission onusienne a relevé « avec préoccupation l’utilisation, par les groupes et éléments terroristes, de la pose d’engins explosifs improvisés pour paralyser ses opérations » au Mali.

De son côté, El-Ghassim Wane, le chef de la Minusma a rendu hommage aux Casques bleus « morts au service de la paix », présenté ses condoléances à leurs proches et à leur gouvernement et souhaité un prompt rétablissement aux blessés.

Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali a été renouvelé d’une année mercredi dernier par le Conseil de sécurité.

Mali : la task force Takuba plie bagage

Les derniers soldats de cette force conjointe européenne ont quitté Bamako le 30 juin.Après la force française Barkhane, c’est au tour du contingent européen de forces spéciales, Takuba, de se retirer du Mali. « La réorganisation du dispositif militaire français au Sahel, décidée en étroite relation avec les partenaires européens et nord-américains, a conduit à la fin des opérations de la task force Takuba au Mali  », lit-on dans le communiqué de l’État-Major des Armées françaises diffusé ce vendredi.

Lancée le 27 mars 2020, la force Takuba a réuni jusqu’à dix nations contributrices : Belgique, République tchèque, Danemark, Estonie, France, Hongrie, Italie, Pays-Bas, Portugal et Suède. La capacité opérationnelle initiale a été déclarée le 15 juillet 2020 et la pleine capacité opérationnelle le 2 avril 2021.

Avec sa force d’intervention rapide motorisée et héliportée et son unité de protection fortes de 800 hommes, « Takuba a prouvé son efficacité en apportant un soutien continu aux Forces armées maliennes (Fama) », souligne le document.

Selon l’État-Major français, la force conjointe européenne est un succès stratégique et tactique. Elle aurait notamment permis la formation d’unités maliennes adaptées au combat contre les jihadistes, évitant ainsi la territorialisation des groupes armés terroristes en particulier de l’État Islamique au Grand Sahara (EIGS) dans la zone des trois frontières (Burkina, Mali et Niger).

Contrairement à Barkhane qui a pris ses quartiers dans la capitale nigérienne Niamey, Takuba est quant à elle vouée à disparaître. Car aucun pays sahélien n’a formulé une demande pour l’accueillir.

L’opération Barkhane avait été lancée le 1ᵉʳ août 2014 en remplacement de Serval dont l’objectif était de lutter contre les groupes jihadistes qui menaçaient de prendre Bamako.

« Avant, tout n’allait pas bien. Mais avec ce départ de ces forces spéciales et la fin de la couverture aérienne, cela donne plus de liberté aux jihadistes présents dans la zone », a affirmé Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des groupes terroristes.

Sur Twitter, les internautes maliens sont partagés entre réjouissance et inquiétude d’un lendemain incertain. « La France officialise la fin de la force Takuba au Mali. Une organisation militaire (qui pouvait) agir sans l’aval du gouvernement malien. Une victoire pour notre peuple », se félicite Amir Nourdine Elbachir.

Du côté d’Ibn Zackarya, c’est l’anxiété qui prédomine. Depuis l’annonce du retrait de la force Takuba, l’État Islamique au Grand Sahara (EIGS) et le Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans (Jnim) s’affrontent pour le contrôle de la zone des trois frontières, signale-t-il.

Suite au départ des soldats de Barkhane de la base de Ménaka, au Mali, l’EIGS a assiégé des localités en y commettant des massacres, poursuit-il, non sans ajouter que « ces forces (Barkhane et Takuba) empêchaient la progression jihadiste ».

« Les populistes, avec des décisions irréfléchies dont le seul but était de se maintenir au pouvoir, ont condamné la population de ces zones tout en étant incapables de leur venir au secours », peste Ibn Zackarya.

De son côté, Sidha Sudarshan regrette qu’« aucune disposition » n’ait été prise avant de demander aux Européens de se retirer. « Tant que les révolutionnaires africains agiront sans planification stratégique, la domination étrangère aura de beaux jours devant elle », soutient-il.

Enfin, Alhassane Tamesna estime que maintenant les militaires au pouvoir « devraient partir sur le terrain pour protéger les populations meurtries » au lieu de « rester dans des salons à Bamako ».

« La Minusma, pas un prétexte pour une présence française au Mali » (expert)

Séga Diarrah, journaliste et politologue malien, décrypte pour APA le renouvellement du mandat de la Minusma, l’adoption de la loi électorale et ses éventuelles répercussions sur le bras de fer avec la Cédéao.Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) a été prolongé d’une année. Le Mali a émis des réserves comme la liberté d’enquêter sur les violations des droits humains. Comment analysez-vous la situation ?

Entre les autorités de la transition malienne et la communauté internationale, une défiance s’est instaurée depuis le coup de force de mai 2021 ayant mis un terme à la transition entamée après le coup d’Etat d’août 2020 contre Ibrahim Boubacar Keïta (IBK).

Bamako veut définitivement tourner le dos à la solution franco-onusienne de résolution de la crise sécuritaire au profit d’un partenariat avec la Russie. Le départ de la mission de l’Organisation des nations unies (Onu) du Mali serait la dernière étape de ce processus.

Sauf que la France, soutenue par la communauté internationale, après dix années de présence dans le Sahel à travers l’opération Serval puis Barkhane, n’envisage pas la fin de cette manière.

Dans ce contexte, le Conseil de sécurité de l’Onu devient un espace d’influence. Les autorités maliennes invoquent leur souveraineté et souhaitent créer des restrictions de mouvement à la Minusma qui s’intéresse de plus en plus aux activités de l’armée malienne et des instructeurs russes.

Finalement, le Conseil de sécurité a compris les enjeux pour bien trancher. Même si la Minusma est libre de ses mouvements au Mali afin de pouvoir enquêter sur les éventuelles violations du droit humanitaire, elle ne sera pas un prétexte pour maintenir une présence militaire française quelconque sur le sol malien.

 

Une nouvelle loi électorale a récemment été votée au Mali et l’Autorité Indépendante de Gestion des Elections (AIGE) créée. Pour certains observateurs, c’est un nouveau pas vers la transmission du pouvoir aux civils. Etes-vous de cet avis ?

Non ! Je ne pense pas que cette loi fournit suffisamment de garanties pour un retour à l’ordre constitutionnel. L’adoption de la nouvelle loi électorale le 17 juin dernier et sa promulgation une semaine après répondent à une volonté opportuniste. Avant tout, il s’agit d’arriver à la réunion de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) du 3 juillet prochain avec des avancées pour espérer une levée des sanctions.

En outre, la nouvelle loi électorale est très différente du projet de loi déposé par le gouvernement et qui se rapprochait plus des aspirations de la population. Dorénavant, la junte aura la mainmise sur le processus électoral et les militaires pourront participer à l’élection présidentielle.

 

Peut-on percevoir la nouvelle loi électorale comme un moyen pour les militaires de se maintenir au pouvoir ? Si oui, est-ce que cela ne sera pas à l’origine de nouvelles tensions entre Bamako et la Cédéao ?

Cette loi électorale viole la charte de la transition adoptée en octobre 2020 et révisée en février 2022 avec l’assentiment de l’ensemble des acteurs maliens et de la Cédéao. Cependant, l’organisation régionale ne peut pas à interférer dans les lois d’un pays souverain. Par contre, la Cédéao peut exiger le respect de la charte de la transition.

L’article 155 de la nouvelle loi électorale encourage clairement les candidatures militaires. Le Mali est un pays en crise. Pendant les dix dernières années marquées par une insurrection jihadiste sur une partie considérable de son territoire, nous avons assisté à son effondrement progressif sans possibilités de renaissance.

Les stigmates des 23 années de dictature de Moussa Traoré, qui ont connu leur terme en 1992 avec l’arrivée d’Amadou Toumani Touré (ATT) au pouvoir, sont encore visibles dans la société. Le désarroi et l’amertume alimentent le dégagisme. Ils n’autorisent pourtant pas la politique de la terre brûlée. Car les Maliens sauront faire les meilleurs choix le moment venu.

Éthiopie : l’Onu alarmée par les atrocités contre des civils

L’Organisation des Nations Unies invite le monde à ne pas détourner le regard sur la situation en Éthiopie où les populations sont prises entre deux feux.En Éthiopie, les civils payent un lourd tribut à l’insécurité qui règne dans plusieurs régions du pays. La Commission d’enquête de l’Organisation des nations unies (Onu), dans une note rendue publique ce jeudi, se fait l’écho de violations présumées du droit international des droits de l’Homme, du droit humanitaire et du droit des réfugiés.

« Il y a un peu plus d’une semaine, la Commission a reçu des informations faisant état de la mort de 200 à 500 civils lors d’un massacre présumé dans l’Oromia occidental sur lequel nous enquêtons », a déclaré devant le Conseil des droits de l’Homme de l’Onu, la présidente de la Commission, Kaari Betty Murungi.

Selon les enquêteurs onusiens, la propagation de la violence est alimentée par des discours de haine ethnique et sexiste qui sont un signe avant-coureur de nouveaux crimes atroces contre des civils innocents, en particulier des femmes et des enfants.

Sur le terrain, notent les Nations Unies, l’extension du conflit aggrave la crise humanitaire en Éthiopie et plus globalement dans la région. La poursuite des violences et les restrictions imposées par les différentes parties ont entraîné une crise humanitaire complexe. Celle-ci, associée à la sécheresse, a exacerbé la misère de millions d’Éthiopiens et poussé des dizaines de milliers d’autres à fuir vers les pays voisins.

« Ces événements et la crise humanitaire prolongée, y compris les blocages de l’aide alimentaire et médicale, des fournitures et des services, font courir un risque grave à la population civile éthiopienne et à la région », a affirmé la présidente de la Commission. Elle a par ailleurs indiqué que les obstructions à l’aide humanitaire « peuvent constituer des crimes graves ».

Enfin, la Commission demande instamment au gouvernement éthiopien de poursuivre les responsables de ces violations en vertu du droit international parce que « les survivants et les victimes réclament justice ».

Mali : le mandat de la Minusma renouvelé

La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) va se poursuivre jusqu’au 30 juin 2023.Le Conseil de sécurité de l’Organisation des nations unies (Onu) s’est réuni ce mercredi pour discuter principalement de l’opération de maintien de la paix au Mali confronté à la menace jihadiste. Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma), expirant ce jeudi, a été prolongé d’une année.

Lors de cette session, le Royaume-Uni et les États-Unis ont demandé un renforcement des prérogatives de la mission onusienne en matière de droits humains. En outre, ces deux pays ont souhaité que le soutien de la Minusma aux Forces de défense et de sécurité maliennes soit conditionné à un respect strict de la Politique de diligence voulue en matière de droits de l’Homme de l’Onu.

C’est pourquoi, la nouvelle résolution proposée par la France contient un paragraphe imposant aux autorités maliennes de garantir à la Minusma une liberté de mouvement notamment pour enquêter sur les violations des droits de l’Homme.

A ce sujet, Issa Konfourou, l’ambassadeur permanent du Mali aux Nations Unies, a déclaré que « pour des impératifs de respect de la souveraineté du Mali, de coordination et de sécurité, les mouvements de la Minusma ne peuvent se faire qu’avec l’accord des autorités compétentes maliennes ».

Poursuivant, le diplomate malien a assuré que son pays « n’est pas en mesure de garantir la liberté de mouvement pour des enquêtes de la Minusma sans l’accord préalable du gouvernement (et) n’entend pas exécuter ces dispositions malgré leur adoption par le Conseil de sécurité ».

Sur Twitter, Julien Antouly, chercheur à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) au Mali, a affirmé que l’autorisation accordée aux forces françaises pour appuyer la Minusma est supprimée à la demande de Bamako. Par conséquent, l’opération Barkhane n’a plus de mandat pour agir au Mali.

Quant à la Force conjointe du G5 Sahel, a-t-il poursuivi, le soutien de la Minusma est suspendu à cause du retrait du Mali de l’organisation. Enfin, le Conseil de sécurité de l’Onu s’attend à ce que le Secrétaire Général produise un rapport sous 6 mois sur la situation politique au Mali, la coopération avec les autorités et les conditions nécessaires au maintien de la Minusma.

Mali: en fin de mandat, quel avenir pour la Minusma ?

Alors que leur mandat doit expirer jeudi 30 juin 2022, les casques bleus engagés au Mali seront édifiés ce mercredi sur leur renouvellement ou non lors d’un vote du Conseil de sécurité des Nations unies.En avril 2012, le Mali est sous les décombres. Immense territoire du Sahel, ce pays se découvre comme un Etat failli. Des groupes jihadistes et rebelles s’emparent d’une grande partie du territoire malien et font régner leur loi, provoquant le coup d’Etat contre Amadou Toumani Touré (ATT). Président par intérim, Dioncounda Traoré accepte l’intervention de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies de stabilisation au Mali (Minusma), en plus de l’aide militaire de la France, pour aider son pays à retrouver sa souveraineté territoriale.

Le 25 avril 2013, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) est créée par la résolution 2100 du Conseil de sécurité de l’Onu. Les soldats onusiens ou casques bleus sont déployés ainsi avec des missions bien différentes que celles de leurs collègues français de l’opération Serval puis Barkhane.

« Guidées par trois principes fondamentaux que sont le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force (sauf en cas de légitime défense ou lorsque leur mandat le rend indispensable, les opérations de maintien de la paix sont devenues aujourd’hui polyvalentes et multidimensionnelle », décrit le rapport de la commission politique de l’assemblée parlementaire de la Francophonie sur les missions de maintien de paix de l’Onu.

Présenté en mars 2018 à Liège, en Belgique, par l’ancien député belge Alain Onkelinx, le document indique que « ces opérations sont appelés à maintenir la sécurité, mais aussi à faciliter le processus politique, à protéger les civils, à aider au désarmement, à la mobilisation et à la réinsertion des anciens combattants, à soutenir l’organisation d’élections libres, à protéger et à promouvoir les droits de l’homme et à rétablir la primauté du droit ».

Un bilan mi-figue, mi-raisin

Neuf ans après, la Minusma fait partie des treize opérations de l’Onu encore actives dans le monde. Mais pour quel bilan ?

« Remplaçant sur de nombreux plans l’Etat malien défaillant, la Minusma a rempli à minima, en lien avec d’autres acteurs y compris parmi les groupes armés signataires, des missions régaliennes : patrouille de présence, accompagnement et montée en gamme des forces de sécurité, accompagnement des populations isolées ou fragiles, accompagnement des autorités politique dans le cadre des accords d’Alger, fournitures de services de base au bénéfice des populations et médiation entre groupes armés signataires », souligne dans un document transmis à APA, Amanar-Advisor, cabinet d’intelligence stratégique et de veille sur le Sahel, basé à Strasbourg, en France.

En septembre 2013, le Mali est revenu à un ordre constitutionnel marqué par l’élection d’Ibrahim Boubacar Keita comme président de la République, à l’issue d’un scrutin à deux tours. En 2015, un accord est trouvé entre Bamako et des rebelles indépendantistes pour un retour progressif vers la paix au nord Mali. Il s’agit de l’Accord d’Alger.

Par contre, la situation sécuritaire ne s’est pas améliorée. Délogés des villes du nord, les jihadistes ont créé des foyers de tension dans le centre et ont même exporté l’insurrection en dehors du territoire malien. Ils ont remis en cause l’efficacité de la présence de l’opération Barkhane qui a remplacé l’intervention Serval en 2014 et l’action de la Minusma même si celle-ci n’est pas censée faire du contreterrorisme.

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La montée de l’insécurité sera d’ailleurs l’une des causes de la déposition d’Ibrahim Boubacar Keita en août 2020 par des colonels qui, neuf mois plus tard, écartent le président de la transition Bah N’daw et son Premier ministre Moctar Ouane pour s’installer au pouvoir.

En réaction, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a exigé l’organisation d’élections dans un délai raisonnable pour la transmission du pouvoir aux civils, sous peine de sanctions. Une étape qu’elle franchira le 9 janvier 2022 en prononçant un embargo sur le Mali, après le report des élections présidentielle et législatives initialement prévues en février 2022.

En conflit depuis peu avec Bamako après qu’elle a décidé de réarticuler l’opération Barkhane, Paris appuie cet embargo. Cette position braque davantage la junte malienne qui, non seulement, dénonce les accords militaires liant le Mali et la France depuis 2013, mais compromet également la conduite des opérations de la Minusma dont le mandat prend fin le 30 juin 2022.

La Division des droits humains de la Minusma n’a plus carte blanche pour enquêter sur tous les cas d’atteintes ou violations des droits de l’Homme qui lui sont rapportés. Après des allégations d’exactions contre des civils à Moura (centre), lors d’une opération de l’armée malienne accompagnée d’éléments de la compagnie militaire controversée russe Wagner, les enquêteurs de l’Onu n’ont pas été autorisés à effectuer le déplacement sur le site pour « établir les faits ». À cela s’ajoute le blocage par Bamako, depuis février 2022, de la rotation de 2480 casques bleus de sept pays d’Afrique de l’Ouest, membres de la Cedeao.

Malgré ces difficultés à mener convenablement sa mission sur le terrain, l’Organisation des nations unies n’a pas l’intention de quitter le Mali où elle compte à ce jour 12.266 militaires, 1720 policiers et 1180 civils déployés sur douze sites répartis en secteurs entre le nord et le centre.

La Minusma, objet de débat à l’Onu

Le 13 juin, lors de la réunion d’information sur le Mali au Conseil de sécurité, le diplomate mauritanien El Ghassim Wone, chef de la Minusma, a formulé le besoin de prolongation du mandat de la force onusienne. Pour lui, sa présence est « aussi nécessaire que jamais » parce que les civils n’ont jamais été aussi vulnérables.

La dernière note trimestrielle de la Minusma a relevé 449 actes de violences affectant un total de 812 civils dont 543 décès imputables aux groupes armés jihadistes et aux forces de défense et de sécurité maliennes. Le rapport présenté par son représentant au Mali plaide aussi pour l’augmentation des effectifs de la Minusma de 2069 personnes en uniforme.

En outre, le Conseil de sécurité devrait normalement renouveler le mandat de la Minusma pour une année supplémentaire. Bamako y est favorable sous quelques conditions. « Pour le Mali, il est essentiel que le mandat soit centré sur la protection des populations civiles et l’appui à l’établissement de l’autorité de l’Etat sur l’ensemble de son territoire », a affirmé le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, au siège de l’Onu, à New York.

Selon le chef de la diplomatie malienne, « il est indispensable de mieux définir et articuler la notion de protection des civils dans un contexte de guerre asymétrique ».

Poursuivant, il a invité la Minusma à « prendre en compte la montée en puissance des forces de défense et de sécurité, qui sont désormais en première ligne face aux groupes terroristes ». Ces exigences risquent de transformer considérablement la mission onusienne qui doit désormais se passer du soutien de la Force Barkhane.

« Dans le cadre du renouvellement sus-indiqué sur mandat de la Minusma et l’appui aérien de Barkhane, le Gouvernement du Mali exprime son opposition ferme à l’intervention sur son territoire de la Force Barkhane, après la décision unilatérale de retrait de ladite force et la dénonciation par le Mali des accords de défense avec la France », a rappelé Abdoulaye Diop le 13 juin, appelant « au respect de la souveraineté du Mali et des décisions prises par les autorités maliennes à cet égard ».

Il a assuré que Bamako mettra tout en œuvre pour assumer la responsabilité qui lui incombe d’assurer la sécurité du personnel déployé au Mali.

Fragile après le départ de Barkhane ?

Depuis l’annonce en juin 2021, du retrait de la France du Mali, les attaques contre les casques bleus ont connu une hausse.

Chercheur sénior à Armed Conflict Location and Event Data Project (ACLED), Héni Nsaibia affirme avoir dénombré 55 attaques, occasionnant une vingtaine de victimes (voir graphique). Mission onusienne qui a subi le plus de pertes en vies humaines, la Minusma a déploré 257 décès de casques bleus depuis 2013. Un chiffre qui risque d’aller crescendo si des alternatives ne sont pas trouvées à l’appui de la France.

Pour le Cabinet Amanar Advisor, « l’efficacité de la Minusma après le départ de Barkhane ne passe que par un renforcement ». Ce renforcement parait nécessaire avec la réquisition par l’Ukraine de ses six hélicoptères mis auparavant à la disposition de la Minusma.

Graphique représentant le nombre d’attaques et de morts subis par la Minusma

Dans ce contexte, la décision de l’Allemagne de « renforcer son contingent pour notamment assurer la protection de la plateforme aéroportuaire du Supercamp de Gao » est une bouffée d’oxygène. « Mais, des compétences vont rester en souffrance », reconnaît Amanar-Advisor qui fait allusion à « certaines fonctions supports critiques, comme le soutien sanitaire » qu’assurait Barkhane.

Éthiopie : vers des pourparlers entre le gouvernement et les rebelles

Le gouvernement éthiopien a annoncé avoir formé une équipe de négociation pour entamer des pourparlers de paix avec le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF).Le conflit dans le nord de l’Ethiopie va-t-il connaître une issue ? En tout cas, l’annonce du gouvernement éthiopien pourrait aboutir à une résolution tant attendue par les populations. Ce conflit oppose depuis 18 mois le gouvernement fédéral et la force rebelle au nord du pays.

 Ainsi, le gouvernement fédéral a nommé Demeke Mekonnen, vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, pour mener les négociations. Il sera à la tête d’une équipe composée d’éminentes personnalités proches du pouvoir et de diplomates comme Gedion Timotheos, Temesgen Tiruneh, Hassen Abdulkadir, Redwan Hussien et le lieutenant-général Birhanu Bekele ainsi que Getachew Jenber.

 La date et le lieu pour le début des négociations ne sont pas encore fixés. Mais le ministre de la Justice, M. Gedion, a déclaré, plus tôt lundi 27 juin, que tout résultat du processus de paix devrait s’inscrire dans le cadre de trois principes : le respect de l’ordre constitutionnel, le respect des intérêts nationaux fondamentaux et le rôle de l’Union africaine (UA) en tant que facilitateur du processus

 Le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, a pour sa part salué, début juin, l’engagement des parties impliquées dans la résolution pacifique du conflit du Tigré. Il encourage les deux parties à poursuivre la voie du dialogue politique.

Moura : Amadou Koufa remet en cause la version de Bamako

Quatre mois après les accusations d’exactions de l’armée malienne à Moura (centre), le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM) donne sa version des faits.Un autre son de cloche a résonné sur les évènements controversés de Moura, un village du centre malien. Du 27 au 31 mars, plusieurs dizaines de personnes présentées comme des jihadistes y ont été tuées dans une opération des Forces armées maliennes (Fama), accompagnées d’éléments de la compagnie militaire privée controversée, Wagner.

Dans une vidéo de 2 minutes 50 secondes diffusée par « Az Zallaqa », l’organe médiatique du GSIM, une fédération d’organisations jihadistes affiliées à Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI), Amadou Kouffa, chef de la Katiba du Macina, déclare que, contrairement aux informations fournies par les autorités maliennes, les jihadistes qui étaient présents dans ce village du cercle de Djenné (centre) étaient au nombre de trente.

Au lendemain de cette opération, l’état-major général des armées maliennes (EMGA) avait affirmé avoir neutralisé « 203 combattants des GAT (Groupes armés terroristes) et interpellé 51 personnes ». « A cela, s’ajoute le bilan matériel de 200 motos brûlées et saisies », rapportait l’EMGA.

S’exprimant en arabe, le chef jihadiste, apparu sous un turban noir, accuse l’armée malienne et Wagner d’avoir tué « des centaines de civils musulmans » avec la complicité de certains habitants de Moura.

Des organisations de défense des droits de l’homme comme Human Right Watch avaient réclamé l’ouverture d’une enquête sur des allégations de meurtre de 300 civils ou suspects imputables aux Fama et à Wagner.

Quid de l’enquête de la Minusma ?

En réponse, l’armée malienne a qualifié ces allégations d’exactions sur les populations civiles d’« infondées ». L’État-major est ensuite revenu en détails sur l’opération, précisant que les militaires ont mobilisé des drones de surveillance et des hélicoptères pour d’abord « cerner la zone ».

L’armée soutient que les jihadistes qui tentaient de fuir la localité ont été interceptés et neutralisés par un Mi5, un de ses moyens aériens acquis récemment grâce au renforcement de sa coopération avec la Russie..

« Le contrôle total de la localité a permis de faire le tri, rechercher, identifier des terroristes déguisés et dissimulés parmi les populations civiles », tentait de démontrer l’armée malienne, reconnaissant dans la foulée avoir perdu des soldats sans en préciser le nombre.

La division des droits de l’homme de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) avait décidé de mener une « investigation » pour faire la lumière sur ce qui s’est passé à Moura. Mais à la date de la publication de la note trimestrielle (1er janvier au 31 mars) sur les tendances des violations et atteintes aux droits de l’homme au Mali, « la Minusma n’avait pas pu conduire une enquête in situ à Moura ».

Évoquant des raisons sécuritaires, les autorités maliennes se sont opposées à ce qu’une mission d’enquête de la Minusma se rende à Moura. Des discussions sont en cours pour lever cette « restriction » qui intervient dans un contexte de tension entre le Mali et ses partenaires internationaux.

Les militaires, qui avaient renversé Ibrahim Boubacar Keita en août 2020 et évincé le président de la transition et son Premier ministre neuf mois plus tard, ont fait appel à la compagnie russe controversée Wagner pour « reprendre l’initiative » dans les zones contrôlées par les jihadistes, même s’ils parlent, jusque-là, d’ « instructeurs russes ». Ce choix est justifié par la recherche d’une alternative au retrait de Barkhane décidé par le président français Emmanuel Macron et qualifié comme « un abandon en plein vol » par Bamako.

Promulgation de la charte révisée: vers une levée de l’embargo contre le Mali

Le président de la transition malienne a promulgué vendredi 24 juin la nouvelle loi électorale, un document controversé mais crucial pour la suite de la transition et une éventuelle levée de l’embargo de la Cedeao contre le pays.Les Maliens croisent les doigts. A une semaine de la tenue du sommet décisif des chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao), ils espèrent que les lourdes sanctions prononcées, le 9 janvier, contre leur pays seront cette fois levées ou fortement amoindries. L’organisation sous-régionale attendait depuis longtemps que les militaires au pouvoir présentent un calendrier de transition raisonnable en vue d’un rapide retour des civils au pouvoir. 

Mais au début de ce mois de juin, le colonel Assimi Goïta a unilatéralement prolongé la transition de deux ans, soit jusqu’à mars 2024. Si la Cedeao a « regretté » cette mesure prise en pleines négociations, cela n’a pas empêché à Goïta de poursuivre sa logique. Ainsi, il vient d’entériner le texte adopté par le Conseil national de transition (CNT), l’organe législatif, il y a une semaine, sur l’organisation des prochaines élections. Elles sont censées permettre le retour des civils au pouvoir depuis le coup d’Etat d’août 2020 contre le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta. C’est une condition longtemps posée par la Cedeao pour lever les sanctions sur le pays.

En promulguant la nouvelle loi électorale, le président de transition entérine donc les 92 amendements que le CNT avait imposés aux 219 articles du texte, au grand dam du gouvernement, auteur du projet. La nouvelle loi électorale compte toutefois des dispositions controversées comme celles concernant l’Autorité indépendante de gestion des élections, dont trois des quinze membres seront désormais nommés par Assimi Goïta lui-même. 

Assimi Goïta, candidat à la présidentielle ?

Il en est de même pour l’amendement attribuant au ministère de l’Administration territoriale la préparation technique des scrutins. Selon la société civile aussi, cette nouvelle loi va permettre aux militaires membres des actuelles autorités de transition, notamment le colonel Assimi Goïta, de se présenter à la prochaine élection présidentielle. Ils pourront le faire à condition de démissionner quatre mois auparavant.

En revanche, les autorités maliennes veulent montrer par cette loi électorale leur volonté de rendre le pouvoir aux civils à la fin de la transition et revenir à l’ordre constitutionnel. Elles avaient promis, qu’une fois cette loi mise en place, de présenter rapidement à la Cedeao un calendrier détaillé expliquant les étapes à traverser avant l’organisation des élections.

En attendant de voir si les nouvelles dispositions posées par le pouvoir malien vont convaincre l’organisation régionale lors de son sommet du 3 juillet prochain à Accra, au Ghana, le médiateur de la Cedeao pour le Mali a quitté hier Bamako après « une visite rapide, discrète et décisive ». L’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan, a notamment rencontré le colonel Assimi Goïta avec lequel il a eu « des entretiens fonctionnels ».

« L’équipe a noté les actions entreprises vers un calendrier de transition viable et la promesse des autorités maliennes de rester engagées dans les efforts de restauration de l’ordre constitutionnel dans le pays et la sous-région », a-t-il noté dans les réseaux sociaux. Goodluck Jonathan s’est également dit « convaincu » que « très bientôt, les populations maliennes se rendront compte du travail abattu par la Transition pour atteindre ce niveau de progrès réalisé dans sa marche », a ajouté l’Agence de presse malienne (Amap).

Éradiquer les coups d’Etat

De toute façon, sur le dossier malien, à cause de la survenue de beaucoup d’éléments nouveaux, les discussions risquent de tirer en longueur entre les dirigeants de la région comme cela fut le cas lors du précédent sommet du 4 juin. Ils n’étaient pas tous favorables, certains chefs d’Etat de pays anglophones surtout, à une levée des sanctions compte tenu des avancées politiques lentes au plan national.

Pour éviter une telle situation et aller au consensus prôné dans les décisions de la Cedeao, le président nigérien Mohamed Bazoum a rendu hier une visite officielle à son homologue ivoirien Alassane Ouattara pour « harmoniser leurs points de vue » sur les dossiers « délicats » du Mali, du Burkina Faso et de la Guinée, trois pays de la région dirigées par des juntes militaires. « Ce sont des pays avec lesquels nous voulons entretenir et développer des relations de confort, de confiance, mais souhaiter surtout que le processus démocratique avance et que les peuples de ces pays ne continuèrent pas de souffrir de l’environnement actuel », a dit M. Ouattara.

Il est clair ainsi que la majorité des dirigeants de l’organisation privilégient une sortie de crise. Pour eux, cela doit se faire sans que la Cedeao ne perde la face devant des militaires qui ont pris l’habitude de s’emparer facilement du pouvoir. Ils veulent poser un exemple fort à même de dissuader d’autres soldats qui seraient tentés par des idées de coups d’Etat dans la région ouest-africaine où les menaces sécuritaires fragilisent souvent des régimes démocratiquement élus.

Mali : plus de 60 terroristes neutralisés au centre (armée)

Une semaine après le massacre de 132 villageois dans le centre du pays, l’armée malienne affirme y avoir « neutralisé » 61 djihadistes.L’armée malienne mène la riposte. Dans un communiqué publié vendredi soir, elle déclare avoir neutralisé « 59 djihadistes » à Diallasougou. C’est dans cette zone du centre que « les priorités opérationnelles ont été orientées suite à l’attaque terroriste contre les populations dans la nuit du 18 au 19 juin », à laquelle a été attribuée la mort de 132 civils. Des « responsables » djihadistes figurent aussi parmi les personnes neutralisées lors de cette opération militaire, précise la même source.

Elle a également fait part de « deux terroristes guetteurs neutralisés » dans la zone de Mondoro (centre), en plus de « 8 suspects terroristes interpellés et mis à la disposition de la prévôté » dans le sud du pays, lors d’une opération distincte.

Le gouvernement malien a attribué à la Katiba Macina du chef djihadiste Amadou Kouffa le massacre des 132 civils à Diallassagou et dans deux localités des environs, dans le centre du pays qui est l’un des principaux foyers de violence qui ensanglante le Sahel depuis des années. Mais la Katiba Macina, affiliée au groupe djihadiste Al-Qaïda, a démenti avoir tué ces 132 civils, dans un communiqué authentifié vendredi par l’organisme américain SITE, spécialisé dans la surveillance des groupes radicaux.

Les évènements de Diallassagou constituent l’un des pires carnages de civils au Mali ces dernières années et la dernière tuerie en date d’une récente série d’attaques à travers le Sahel. Le Mali est plongé dans une profonde crise sécuritaire, politique et humanitaire depuis le déclenchement d’insurrections indépendantiste et djihadiste en 2012 dans le nord. La propagation djihadiste a gagné le centre et les pays voisins, le Burkina Faso et le Niger.

Af’Sud : La justice s’engage à extrader les frères Gupta au pays

Les procureurs sud-africains ont promis de ramener « au pays » les frères Gupta, d’origine indienne, qui vivent depuis cinq ans aux Emirats arabes Uni, pour qu’ils soient jugés pour des crimes présumés commis sous le régime de leur « ami » et ancien président Jacob Zuma.Le porte-parole de l’Autorité nationale des poursuites (NPA), Mthunzi Mhaga, a déclaré mercredi que la NPA avait déjà soumis la demande de mandats d’arrêt provisoires par les voies appropriées – une formalité qui devait être respectée.

« En vertu du traité d’extradition entre l’Afrique du Sud et les Emirats arabes unis, l’Afrique du Sud dispose de 60 jours à compter de la date de l’arrestation pour soumettre la demande officielle d’extradition », a déclaré M. Mhaga.

Il a ajouté : « La NPA est en bonne voie pour finaliser ce processus en étroite consultation avec les autorités compétentes des Emirats arabes unis et Interpol, le cas échéant, en respectant pleinement les obligations juridiques nationales et internationales en matière d’extradition ».

Il a indiqué que les aspects diplomatiques et politiques étaient traités en parallèle par les collègues des ministères de la Justice et des Relations internationales et de la Coopération, notant que les processus d’extradition étaient complexes et que chacun d’entre eux avait sa dynamique propre — en fonction du pays concerné.

« Nous avons déjà expliqué pourquoi nous ne ferons pas de commentaires sur les aspects juridiques de l’affaire à ce stade précoce, et cela reste notre position pour des raisons juridiques importantes et spécifiques au dossier », a déclaré le fonctionnaire.

Il a noté avec inquiétude « la désinformation et la spéculation généralisées sur la façon dont la NPA et ses dirigeants gèrent ce processus juridique complexe ».

« Bien que nous reconnaissions l’intérêt public dans cette affaire, nous devons nous concentrer sur l’exécution de notre mandat constitutionnel et de nos responsabilités sans distraction, et sans crainte ni faveur. La NPA accueille favorablement les critiques constructives », a-t-il indiqué.

Cependant, il a ajouté que les récents rapports irresponsables concernant l’apparente « mauvaise gestion » du processus par la NPA, ou son incapacité à répondre aux demandes des EAU, ne sont pas exacts et doivent être rejetés comme des spéculations dangereuses ou des attaques à motivation politique et personnelle visant à saper la NPA et son leadership au cours de ce processus.

Les frères Gupta ont vécu en Afrique du Sud de 1993 à 2018 avant de fuir la loi pour vivre à Dubaï, jusqu’à l’arrestation, il y a quelques semaines, de deux d’entre eux.

Sécurité : le Royaume-Uni assure de son soutien à la Côte d’Ivoire

En visite à Abidjan, le ministre britannique des Forces armées, James Heappey, a assuré que son pays va continuer à collaborer avec la Côte d’Ivoire pour garantir la sécurité du pays face au terrorisme.La Grande-Bretagne va « continuer de collaborer pour garantir la sécurité de la Côte d’Ivoire », menacée par le terrorisme dans la région ouest-africaine, a dit M. James Heappey, après une rencontre avec le ministre ivoirien de la Sécurité et de l’Intérieur, le général Vagondo Diomandé.

Au regard des efforts de l’Etat ivoirien sur les questions de terrorisme, le ministre britannique des Forces armées s’est dit « très encouragé de pouvoir travailler avec la Côte d’Ivoire, au niveau bilatéral et multilatéral » face à ce phénomène dans le Sahel avec une « priorité au Sud ».

Le ministre ivoirien de la Sécurité et de l’Intérieur, le général Vagondo Diomandé, a au nom du ministre d’Etat, ministre de la Défense de Côte d’Ivoire, salué cette visite dans le cadre de la coopération en matière de défense et de sécurité.

« Nous avons compris qu’en mettant ensemble nos efforts, nous parviendrons à combattre efficacement le terrorisme », a soutenu le général Vagondo Diomandé, qui a remercié son hôte pour « cette opportunité de faire en sorte que le Royaume-Uni accompagne la Côte d’Ivoire ».

Le Royaume-Uni est engagé à soutenir l’Etat de Côte d’Ivoire dans la lutte contre le terrorisme, mais également dans la lutte contre la drogue ainsi que la criminalité.

Le général Vagondo Diomandé s’est dit « très sensible à cette démarche », déclarant que la partie ivoirienne fera tout pour que les attentes de la Grande-Bretagne soient comblées. Et ce, avec un appui institutionnel décliné en plusieurs ordres, entre autres, la formation et l’équipement.

Loi électorale : vers une nouvelle tension entre Bamako et la Cedeao ?

L’adoption d’une nouvelle loi électorale au Mali risque de semer les germes d’un nouveau bras de fer entre les autorités de la transition malienne et la Cedeao.La nouvelle loi électorale va-t-elle reléguer au second plan le débat sur la durée de la transition malienne ? Adoptée vendredi 17 juin 2022 par le Conseil national de transition (CNT), cette loi est interprétée par certains observateurs comme une volonté des militaires, actuellement aux affaires après un double putsch, de rester au pouvoir à la fin de la transition.

Exposé au Conseil national de transition (CNT) vendredi 17 juin, l’article 164 permet notamment aux membres des forces armées ou de sécurité qui le désirent de concourir aux prochaines élections présidentielles à condition de démissionner ou d’aller à la retraite au moins six mois avant la fin du mandat en cours du président de la République.

Au sein de l’organe législatif de la transition, le sujet a fait l’objet de discussions et l’article en question a été amendé avant son adoption par la majorité des conseillers en attendant une promulgation de la loi électorale par le chef de l’Etat, le Colonel Assimi Goita.

« Cependant pour les élections pendant la transition, les membres des Forces armées ou de sécurité qui désirent être candidats doivent démissionner ou demander leur mise à la retraite au moins quatre (04) mois avant la date de l’élection présidentielle », précise l’article 155 (ancien 164) dans son deuxième paragraphe.

En lisant cette disposition, un enseignant chercheur malien, préférant garder l’anonymat, « se pose des questions sur les intentions réelles des militaires au pouvoir ».

« En mon sens, l’article 155 de la loi électorale est très clair dans la mesure où il contribue à ancrer dans l’imaginaire collectif, l’éventualité d’une candidature de l’un des membres de l’ex-Conseil national du Salut du Peuple (CNSP) lors des prochaines élections présidentielles », estime Yannick Houphouët Kouablan, responsable du bureau veille et analyse de risques du cabinet de conseil en sûreté, ISAO au Sénégal.

Cependant, cet analyste laisse de la place à une autre interprétation de la nouvelle loi. A l’en croire, il ne faut pas écarter la possibilité qu’elle soit une alternative pour les militaires au pouvoir, au cas où « ils n’auraient pas pu identifier un profil civil en mesure de préserver leurs intérêts au terme de la période de transition ».

En essayant d’ouvrir une brèche pour donner la possibilité à l’un des leurs d’être candidat à la présidentielle, les militaires risquent de favoriser l’établissement d’un climat de méfiance entre la junte et la classe politique malienne. Au même moment, la composition de l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE), l’autre nouveauté de la loi électorale qui est au centre, ne fait pas l’unanimité.

L’article 7 de la loi électorale dit que le collège, organe délibérant est composé de quinze (15) membres désignés par les pouvoirs publics, les partis politiques et la société civile. La majorité, à savoir huit des membres sont nommés par les pouvoirs publics contre sept pour les formations politiques et les organisations de la société civile.

Selon l’enseignant-chercheur malien qui a préféré taire son identité, l’éventuelle participation des militaires actuellement au pouvoir aux prochaines élections « peut peser sur la crédibilité des élections à venir ».

De son côté, Yannick Houphouët Kouablan redoute « un accroissement des tensions entre le Mali et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) ». C’est d’autant plus prévisible que dès le lendemain du coup d’Etat d’août 2020, les chefs d’Etat de la Cedeao avaient tenu à ce qu’il soit mentionné dans la charte de transition que les militaires auteurs du putsch ne seraient pas capables de se présenter aux élections. Une disposition maintenue et même renforcée durant la révision de la charte en février 2022.

Mis devant le fait accompli comme cela est déjà le cas sur la durée de la transition fixée à 24 mois à compter du 26 mars 2022 alors que la conférence des chefs d’Etat qui n’a pu trouver un consensus le 4 juin a décidé de trancher le 3 juillet prochain à l’occasion d’un sommet extraordinaire de la Cedeao, l’énigme est de savoir quelle sera l’attitude l’institution régionale ? Quelle sera la réponse de Bamako en cas de maintien des sanctions économiques et financières au sortir de cette session ?

« Il est clair que le Mali est dans une phase de remise en question et de rejet de plusieurs équilibres : dénonciation des accords de défense le liant avec la France, demande du retrait des soldats de Barkhane du territoire malien, retrait des instances du G5-Sahel et notamment de sa force conjointe etc. », reconnaît Yannick Houphouët Kouablan. « Néanmoins, je ne pense pas que les autorités maliennes de la transition adoptent une posture radicale au point de se retirer de la Cedeao », espère-t-il.

Son homologue malien invite les autorités de Bamako « à ne pas écouter la rue qui les pousse vers une telle décision ». Pour lui, « le Mali est condamné à rester au sein de la Cedeao pour son propre intérêt ». « Sur le plan politique, un éventuel retrait du Mali de la Cedeao renforcerait son isolement sur la scène internationale », prévient Yannick Houphouët Kouablan.

Soudan : nouvelles attaques meurtrières au Darfour (ONG)

Les victimes sont des civils qui résidaient dans les villes de Kerenik et Kulbus situées au Darfour occidental.Au Soudan, les attaques meurtrières contre des civils persistent depuis avril 2022. L’Organisation non gouvernementale de défense des droits humains, Human Rights Watch (HRW) a révélé, ce mercredi 22 juin, que des assaillants armés ont tué dans l’Ouest du Darfour des centaines de personnes et causé le déplacement de milliers d’autres. Ils ont également incendié plusieurs concessions et pillé le bétail.

« Les deux derniers mois n’ont montré que trop clairement le coût dévastateur du retrait des forces de maintien de la paix du Darfour, et du refus de prendre en compte la nécessité permanente de protéger les civils de cette région », a déclaré Mohamed Osman, chercheur sur le Soudan à Human Rights Watch.

A en croire ce dernier, « il est difficile de ne pas avoir l’impression que la communauté internationale, qui avait précédemment observé le Darfour avec des yeux d’aigle pendant des années, a complètement abandonné ces victimes du nettoyage ethnique ».

Pour Human Rights Watch, le Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l’homme au Soudan, qui rassemble des travaux de la Mission intégrée d’assistance à la transition des Nations Unies au Soudan (UNITAMS) et le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), devrait donner la priorité à l’obtention d’un accès régulier au Darfour pour enquêter et rendre compte publiquement des abus.

Les diverses composantes de la mission des Nations unies, le système des Nations unies et les États membres devraient soutenir le travail de ce Bureau et accroître sa capacité de surveillance et de rédaction de rapports sur la protection des civils, notamment en déployant une présence renforcée au Darfour à des fins de surveillance, estime l’ONG.

Selon l’Onu, la dernière attaque contre des civils dans la ville de Kulbus et les villages voisins, dans l’Ouest du Darfour, entre le 6 et le 11 juin, a fait au moins 125 morts, dont cinq enfants, plus de 100 blessés et 33.000 déplacés. La plupart des victimes seraient des membres de la communauté non arabe Gimir.

Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a signalé que près de 25 villages de la communauté Gimir ont été incendiés en cinq jours, prétendument par des membres armés des communautés arabes Rizeigat et Abbala, qui s’étaient mobilisés contre la communauté Gimir à la suite d’un litige entre deux individus.

Pour Kiev, l’Afrique est « l’otage » de la Russie

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est adressé, lundi 20 juin, aux membres de l’Union africaine (UA) en visioconférence depuis Kiev.Sollicitée par la présidence ukrainienne depuis avril, cette rencontre s’est finalement tenue hier à huis clos devant le bureau élargi de l’UA composé du président en exercice, du président de la commission et des ambassadeurs accrédités. Volodymyr Zelensky cherchait à mobiliser les dirigeants africains derrière son pays dans la guerre avec la Russie, lancée il y a plus de quatre mois. Elle est à l’origine de la crise sur l’approvisionnement normal des produits alimentaires et des engrais dans le monde, particulièrement sur le continent.

Le président en exercice de l’UA, le Sénégalais Macky Sall, s’était notamment rendu le 3 juin à Moscou pour demander une reprise des exportations des céréales russes et ukrainiennes, dont certains pays africains sont dépendants. L’Afrique, qui s’est déclarée neutre dans cette guerre, voulait à travers l’allocution du président Zelensky rééquilibrer une communication jusque-là essentiellement tournée vers Moscou.

Sur la crise alimentaire en cours, M. Zelensky a déclaré que « l’Afrique est l’otage de ceux qui ont commencé la guerre contre notre Etat », en référence à la Russie de son homologue Vladimir Poutine. Le niveau « injuste » des prix alimentaires « provoqué par la guerre russe (…) se fait douloureusement sentir sur tous les continents », a-t-il déploré.

Il s’est aussi lancé dans une offensive de charme. Après avoir rappelé la contribution de l’Ukraine aux missions de maintien de la paix en Afrique et les liens commerciaux qui l’unissent au continent, le président a annoncé la nomination prochaine d’un envoyé spécial pour l’Afrique et proposé l’organisation d’une « grande conférence politique et économique Ukraine-Afrique ».

Toutefois, les dirigeants africains ont maintenu devant le président Zelensky leur position de neutralité dans la guerre qui oppose son pays à la Russie. Comptant pour un quart des votes à l’Assemblée générale de l’ONU, « l’Afrique reste attachée au respect des règles du droit international, à la résolution pacifique des conflits et à la liberté du commerce », a dit Macky Sall. Il y a trois mois, près de la moitié du continent s’est abstenu lors du vote condamnant l’agression russe.

« Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est adressé à l’Assemblée de l’UA aujourd’hui. Nous avons réitéré la position de l’UA sur la nécessité urgente d’un dialogue pour mettre fin au conflit afin de permettre le retour de la paix dans la région et de rétablir la stabilité mondiale », a noté de son côté le président de la commission de l’UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat.

Mali: les morts de l’attaque de Bankass indignent la toile

Le premier bilan officiel des attaques perpétrées ce week-end dans le centre du pays « fait état de 132 civils froidement tués par les combattants de la Katiba du Macina de Amadou Kouffa », informe le gouvernement malien.Au Mali, les jours passent et « l’horreur se poursuit », déplore Medhy Medhy sur son compte Twitter. Dans la nuit du samedi 18 juin au dimanche 19 juin, plus de 130 personnes ont en effet été tuées à Diallassagou et dans deux autres localités du cercle de Bankass « par les combattants de la Katiba du Macina de Amadou Kouffa », organisation affiliée à Al-Qaïda.

Cet énième massacre a provoqué une onde de choc auprès de plusieurs internautes qui dénoncent entre autres l’impuissance des militaires au pouvoir à Bamako d’enrayer ce cercle de violence. « La fanfaronnade et l’incapacité notoire d’Assimi Goïta et ses copains militaires de bureau à défendre le Mali étalées, une fois de plus. Obnubilés qu’ils sont par le luxe du pouvoir, le Mali subit pire que sous le régime civil. 132 autres civils tués sous le règne militaire », peste sur Twitter Bakary Bamba.

« Ça fait déjà combien d’années qu’ils sont au pouvoir ces supposés défenseurs de la Nation ? », s’interroge Papis Toorey à qui Mohamed Sidibé rétorque : « Ils (les militaires) veulent juste confisquer le pouvoir. Et après le populisme et la propagande sont leurs punchlines ».

Lassé par tant de drames, Youssouf Bakayoko se demande quant à lui : « À quand la fin ? ». Difficile de trouver une réponse à cette question tant la situation s’est fortement dégradée ces dernières années.

Christian Zan, doctorant en droit international sur la Cybersécurité, estime toutefois que « l’aide de l’armée française et de toutes autres forces nationales est souhaitée. Car, le Mali, en l’état actuel de son armée, n’est pas capable de faire face à l’ogre terroriste ».

Depuis 2011 et la chute du guide Libyen Mouammar Kadhafi dans le sillage des printemps arabes, le Mali est confronté à une grave crise sécuritaire. L’arrivée au pouvoir d’un groupe d’officiers mené par le Colonel Assimi Goïta après un premier coup d’état ayant renversé le président Ibrahim Boubacar Keita (IBK) en août 2020 et un second coup de force, fin mai 2021, actant la mainmise totale des militaires sur Bamako, n’a pas permis d’améliorer la situation. 

Le soutien en équipement et en combattants fournis aussi par la Russie n’a pas non plus donné les résultats escomptés. Les dernières sorties des Forces armées maliennes appuyées par les combattants du groupe de sécurité privé russe Wagner ont d’ailleurs été accompagnées de plusieurs exactions et massacres de civils.

Comment le Burkina Faso a basculé dans un jihadisme endémique

Au Burkina Faso, les attaques jihadistes se sont multipliées ces dernières années.Jeudi 9 juin, les jihadistes ne se sont pas contentés de tuer neuf gendarmes à Seytenga. Trois jours plus tard, ils sont revenus dans cette localité du nord-est, située dans la province de Séno, à 276 kilomètres au nord-est de Ouagadougou, pour s’en prendre aux civils.

Selon plusieurs témoignages, ils ont tiré sans sommation, faisant au final 86 morts. Ce massacre est l’un des signes de la détérioration de la situation sécuritaire au Burkina Faso depuis 2015. Avant, ce pays n’avait pas connu d’événement lié à l’activité jihadiste qui était pourtant en pleine expansion dans son voisinage immédiat.

Qu’est ce qui a changé pour que le Burkina Faso, considéré un temps comme un « Etat-médiateur » pour avoir offert ses bons offices dans le conflit du Mali en 2012, voit « 40% de son territoire » échapper au contrôle de l’Etat ?

Le nord du pays a servi de réceptacle aux premières activités des groupes jihadistes. Le 23 août 2015, le poste de police d’Oursi, dans la province de l’Oudalan, est attaqué par des individus armés venus du Mali. Le pays était engagé dans un processus de transition avec plusieurs rebondissements après la chute de Blaise Compaoré le 30 octobre 2014 précipité par un soulèvement populaire suite à son souhait de modifier la constitution pour se maintenir au pouvoir malgré ses 27 ans de règne.

Intitulée « La montée de l’insécurité frontalière : ce que disent 800 sahéliens », une étude réalisée par le Centre pour le dialogue humanitaire et le Programme des Nations-unies pour le développement (PNUD) en 2016, considère la transition politique de l’époque comme « la menace la plus sérieuse d’insécurité ».  Elle faisait référence à la mobilisation des forces de sécurité pour des préoccupations politiques en lieu et place de la défense du territoire. La tentative avortée du 16 septembre 2015 du Général Gilbert Diendéré de s’emparer du pouvoir, en s’appuyant sur le régiment de la sécurité présidentielle (RSP) dont il était le patron en est une illustration parfaite.

Lorsque Roch Marc Christian Kaboré arrive aux affaires au soir de la présidentielle du 29 novembre 2015, la question sécuritaire s’est imposée comme l’une des priorités de son action. Pendant ce temps, le nord du Burkina Faso, essentiellement la région du Sahel qui souffrait déjà de sa proximité avec des pays déjà touchés par le jihadisme et de carences en termes de services sociaux de base, continuait d’enregistrer de nouveaux incidents liés à l’insurrection jihadiste.

En septembre 2016, le jihadiste sahraoui Adnan Abou Walid al Sahraoui revendique la première action de la filiale de l’Etat islamique au Sahel, pourtant non encore reconnue par le commandement central depuis la zone syro-irakienne. L’attaque était dirigée contre un poste de Douane à Markoye. Un douanier et un civil y ont péri.

Le 15 janvier 2016, Al Qaïda au Maghreb Islamique Islamique (AQMI) qui vient de sceller ses retrouvailles avec Al Mourabitoune, frappe au cœur de Ouagadougou. Le Splendid Hotel, le restaurant Cappucino et le Taxi Brousse fréquentés sont ciblés par trois assaillants dont un burkinabé. La même année, un groupe local voit le jour dans la province du Soum, toujours dans la région du Sahel. Proche d’Amadou Kouffa, jihadiste malien et chef de la Katiba Macina, Malam Ibrahim Dicko monte « Ansarul Islam » (les partisans de l’Islam). Le groupe tue 12 soldats à Nassoumbou, le 26 décembre 2016.

Ce rythme infernal de violence ne s’infléchit pas durant le magistère de Roch Marc Kaboré. La naissance, le 2 mars 2017 du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM) ne fera qu’empirer les choses. Un an après sa naissance, cette fédération des principales organisations jihadistes sahéliennes proches d’Aqmi réussit une nouvelle intrusion à Ouagadougou. Cette fois, l’offensive vise l’État-major des armées burkinabés et l’ambassade de France à Ouagadougou, en représailles à la mort de Mohamed Ould Nouini, éliminé quelques jours plus tôt par l’armée française au Mali. Commandant d’Al Mourabitoune, cet arabe malien de Gao est le principal instigateur des premières attaques « terroristes » de Ouagadougou et de la station balnéaire de Grand Bassm en Côte d’Ivoire. Cette évolution se concrétise par une assise incontestable sur le territoire burkinabé.

Pour Apa, Héni Nsaibia, chercheur senior à Armed Conflict Location & Event Data Project (ACLED), a cartographié les groupes jihadistes présents sur le sol burkinabé. « GSIM est présent dans la plupart des régions mais reste plus actif dans la Sahel (Soum et Yagha en particulier), le Centre-nord, le Nord, la Boucle de Mouhoun, l’Est, Cascades, les Hauts-Bassins, le Sud-Ouest, le Centre-Est et est émergent dans le Centre-Ouest ».

Quant à l’Etat islamique, poursuit le chercheur, ses zones d’influence incontestables se trouvent dans l’Oudalan et dans le Séno. « Ses éléments se font aussi apercevoir dans la partie nord du Yagha et dans le nord-est du Centre-nord », ajoute-t-il.

Face à la présence et à la montée inquiétante du jihadisme, les autorités burkinabé se voient obligées de réajuster leur stratégie de lutte. C’est ainsi qu’en janvier 2020, le corps des Volontaires pour la défense de la Patrie (VDP) est formé, avec pour objectif « d’appuyer les forces de défense et de sécurité dans leur mission de sécurisation du territoire national ». Ils reçoivent une formation de 14 jours délivrée par l’armée.

A la fin de cette formation, ils reçoivent un équipement composé de matériel de communication, de vision et d’un armement. « Sauf que la création de cette milice est contreproductive car elle a contribué à attiser les tensions entre les populations civiles et les jihadistes qui les considèrent maintenant comme des cibles », fait constater Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des mouvements jihadistes.

Cette propension des groupes jihadistes à se rendre coupables d’exactions contre des civils peut aussi s’expliquer par la liberté d’actions dont certains d’entre eux peuvent faire prévaloir vis-à-vis de la chaîne de commandement. « L’exemple le plus parlant, c’est celui de Solhan où un massacre a été commis par une unité proche du JNIM (l’acronyme arabe du GSIM), mais qui a été niée ou critiquée par la communication officielle du groupe. Finalement on avait compris que c’était une unité indisciplinée », démontre Wassim Nasr.

La goutte d’eau de trop

Cependant, aussi meurtrier soit-il, ce carnage n’a pas été la goutte d’eau de trop. Le vase a réellement cédé après l’attaque d’Inata, à l’occasion de laquelle 53 victimes dont 49 gendarmes et 4 civils ont été dénombrées. Les conditions presqu’inhumaines dans lesquelles étaient abandonnées les gendarmes de ce détachement ont créé une onde de choc et ont planté les germes du départ précipité de Roch Kaboré.

Malgré les décisions prises pour rectifier le tir, le président, réélu pour un mandat de cinq ans, n’a pu éviter son renversement le 24 janvier par le Mouvement Populaire pour la Sauvegarde et la Restauration (MPSR) amené par le Lieutenant-Colonel Paul Henri Sandaogo Damiba. Mais ce changement de direction n’a pas amélioré la situation sécuritaire. L’ONG Armed Conflict Location and Data Project (ACLED) indique que « les violences liées à Al-Qaïda et à l’Etat islamique ont augmenté de 7% au cours des trois premiers mois de règne de la junte par rapport à la période précédente ».

Pour inverser la tendance, le lieutenant-colonel Damiba qui a prêté serment en tant que président de la transition s’est adressé à la nation le 1er avril et a annoncé la « création de comité locaux de dialogue pour la restauration de la paix, dont la mission est d’initier des approches avec les membres des groupes en rupture de dialogue avec la nation ».

« Mais la situation ne s’est pas améliorée. Elle s’est même détériorée », estime Wassim Nasr. Chercheur sénior à ACLED, Héni Nsaibia a recensé, sans préciser les groupes, 404 attaques ayant occasionné 795 décès entre le début de la mutinerie, le 23 janvier et le 3 juin. À titre de comparaison, l’Etat islamique a revendiqué 67 attaques du 16 janvier 2019 au 12 novembre 2021, confie à Apa Damien Ferré, directeur général de la société Jihad Analytics, spécialisée dans l’analyse du jihad mondial et cyber.

Wassim Nasr explique la dégradation de la situation par l’absence de « solution magique » à la problématique du jihadisme. La tâche risque de se compliquer davantage d’après le journaliste qui affirme avoir appris que « certaines populations sont allées chercher l’aide du GSIM pour faire face à l’Etat islamique pendant l’attaque de Seytenga ». « On est en train d’assister à une dynamique similaire à celle du Mali où des civils qui se sentent délaissés sont obligés de demander secours de l’un des deux groupes jihadistes », s’inquiète-t-il.

A cela, se grefferont les conséquences désastreuses du retrait du Mali des instances et de la force conjointe du G5 Sahel, pour protester contre des « manœuvres » visant à l’empêcher de jouir de son tour de présidence de cette organisation créée en 2014 pour lutter contre les groupes jihadistes au Sahel.

Ce vide de coopération régionale ajouté aux réticences de Ouagadougou à faire appel aux forces de Barkhane en cas d’attaque, ouvre la voie à un autre acteur qui est en train de s’illustrer au Mali, la compagnie militaire privée controversée, Wagner. Wassim Nasr reconnaît que des militaires pensent à cette option qui, à son avis, n’a pourtant pas eu de résultats militaires tangibles et probants au Mali.

Pour le moment, le président de la transition n’envisage pas cette hypothèse. Lors d’une visite à la ville de garnison de Bobo Dioulasso, le lieutenant-colonel Damiba avait clairement déclaré que le salut ne viendra pas de l’extérieur. L’actuel chef suprême des armées burkinabé veut d’abord compter sur ses hommes pour sécuriser le territoire national et soumettre un bilan à ses compatriotes dans cinq mois, comme il en avait fait la promesse le 1er avril.

G5 Sahel : Pourquoi le Mali a retiré ses troupes ?

Moins d’un mois après sa décision de quitter le G5 Sahel, le Mali a désengagé ses forces de la Force Conjointe.En annonçant le 15 mai dernier son retrait des instances du G5 Sahel, Bamako ne bluffait pas. Mardi 14 juin, les autorités de la transition de Bamako ont annoncé mettre fin à « l’engagement des personnels maliens en service au sein des fuseaux ouest et centre pour compter le 30 juin ». Une démarche qui s’inscrit « dans le cadre de la mise en par le respect de la décision prise par Bamako le 15 mai de de son retrait de toutes les instances du G5 Sahel, y compris la Force Conjointe du G5 Sahel », précise une lettre du chef d’Etat-major des armées maliennes adressée au Commandant de la Force Conjointe du G5 Sahel. Cette organisation régionale qui regroupe le Mali, le Burkina-Faso, le Niger, le Tchad et la Mauritanie, lancée en 2014 pour combattre les groupes jihadistes présents dans le Sahel.

Créée, elle en 2015, la Force conjointe (FC) était jusqu’ici constituée de sept bataillons comptant chacun 650 hommes (550 militaires, 100 policiers et gendarmes) répartis sur trois fuseaux : Ouest (Mali –Mauritanie), Centre (Mali, Burkina Faso et Niger) et Est (Niger –Tchad).

Cette force est chargée de combattre le terrorisme, le trafic de drogue, les trafics d’êtres humains avec un droit de poursuite de part et d’autre des frontières. Une possibilité dont se prive désormais Bamako en se retirant du G5 Sahel et de sa force conjointe.

Jeudi 19 mai, le président en exercice du G5 Sahel, le Général Mahamat Idriss Deby Itno du Tchad avait invité les autorités de la transition à reconsidérer leur position.

Jugeant injustifiée la décision du Mali, la Mauritanie avait promis « de mettre tout en œuvre pour que le G5 Sahel surmonte tous les obstacles qui se dressent devant lui ». Vendredi 20, Nouakchott avait dépêché son ministre des Affaires étrangères, de la Coopération et des Mauritaniens de l’Extérieur, Mohamed Salem Ould Merzoug à Bamako.

Le Niger n’a pas jugé nécessaire de faire des efforts pour sauver les meubles. Niamey a préféré acter la mort du G5 Sahel qui vient de prendre effet avec le retrait des militaires maliens des cinq des sept fuseaux et du poste de commandement (PC) de Bamako. Selon le document du chef d’état-major malien, les militaires rappelés reprendront service « dans leurs armées à compter du 1er juillet ».

Le Mali a décidé de se retirer du G5 Sahel en raison de ce que son gouvernement a qualifié de « manœuvres » visant  à l’empêcher d’assurer la direction de l’organisation régionale à partir de février 2022, date à laquelle il devait théoriquement hériter de cette charge en vertu du principe de la présidence tournante consacré par les textes fondamentaux de cette entité.

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Théâtre d’un premier coup d’état en août 2020 quand un groupe de jeunes officiers a démis le président Ibrahim Boubacar Keita (IBK), le Mali est aujourd’hui dirigé par un gouvernement de transition dominé par les militaires qui a été installé au lendemain de la déposition, fin mai 2021, du président Bah N’daw et de son premier ministre Moctar Ouane alors chargés d’organiser le retour du pays vers l’ordre constitutionnel.

Contrairement au putsch contre IBK qui a été très peu désapprouvé par les partenaires du Mali, le second coup d’État a été largement condamné et a provoqué une nette dégradation des relations entre Bamako et la communauté internationale.

Après la France qui avait d’abord menacé puis décidé de retirer ses troupes engagées dans la lutte anti-jihadiste au Mali, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a prononcé plusieurs sanctions contre Bamako, dont un embargo économique et financier ainsi que la fermeture des frontières aériennes et terrestres avec le pays.

Bamako qui soupçonne une puissance « extrarégionale », en clair la France, d’être derrière ces sanctions n’a pas apprécié « le manque de solidarité » de pays du G5 Sahel que certains cercles du pouvoir malien accusent d’être à la solde de Paris qui s’est montré moins exigeant avec le Tchad où des militaires ont pris le pouvoir de manière anticonstitutionnelle, après le décès, le 20 avril 2021, du Maréchal Idriss Deby Itno.

RDC : des manifestants se dressent contre l’« agression rwandaise »

Plusieurs milliers de manifestants congolais ont tenté, mercredi 15 juin à Goma, de traverser la frontière avec le Rwanda, accusé de soutenir la rébellion du M23 dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).Les manifestations contre Kigali et de soutien à l’armée congolaise ne faiblissent pas en RDC. Hier dans la matinée, plusieurs personnes à Goma se sont dirigées vers la frontière rwandaise. Elles ont cherché à franchir les barrières qui séparent les deux pays pour exprimer leur colère face à l’« agression rwandaise ».

 « La population congolaise voulait traverser la frontière avec le Rwanda voisin afin de montrer au régime de Kigali qu’elle n’a pas peur de l’affronter et en a marre de l’hypocrisie du Rwanda dans les relations diplomatiques avec la RDC. Elle l’accuse de soutenir les terroristes du M23, un mouvement rebelle qui avait été défait en 2013 par les forces armées de la République démocratique du Congo », explique à APA Victor Muhindo, journaliste basé à Goma, capitale de la province du Nord-Kivu.

 « La situation est calme depuis le début de l’après-midi. Mais à cause de cette marche initiée par la société civile pour soutenir les forces armées de la RDC, au front contre le M23 soutenu par le Rwanda et l’Ouganda, selon le gouvernement congolais, l’atmosphère ressemblait à une ville morte vu que les activités socio-économiques sont restées paralysées toute la journée », a-t-il ajouté.

 Scènes de pillages

 Dans la journée du mercredi en effet, des scènes de pillages de magasins appartenant à des ressortissants rwandais ont été observées dans un quartier commercial, selon plusieurs témoignages. Dans la ville, les banques, stations-service, écoles, boutiques et autres commerces étaient fermés, à l’exception de quelques pharmacies. Dans la panique, des ressortissants rwandais qui se trouvaient dans la ville fuyaient pour traverser la frontière vers le Rwanda, tandis que des Congolais qui se trouvaient du côté rwandais faisaient le mouvement contraire.

Sur certaines artères, des manifestants arrêtaient des véhicules, les fouillaient, en exigeant de connaître l’identité de leurs occupants. Des menaces verbales envers des personnes considérées comme « rwandophones » de par leur apparence ont également été rapportées par l’AFP. « Nous ne voulons plus des Rwandais, laissez-nous aller affronter (le président Paul) Kagame chez lui », criaient des manifestants. Mais ils ont été dispersés par la police anti-émeute alors qu’ils tentaient de forcer le passage vers le Rwanda. Une personne au moins a été blessée, selon l’AFP.

 Depuis plus de deux décennies, le Rwanda est pointé du doigt pour son « implication dans la déstabilisation de la partie est de la RDC », particulièrement la province du Nord-Kivu, où s’étaient réfugiés les rebelles des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR (FDLR). Ils sont pour la plupart des Hutu rwandais accusés d’avoir massacré des Tutsi lors du génocide rwandais de 1994. Kigali les considère comme une menace même s’il dément, à son tour, les accusations de soutien aux rebelles congolais du M23.

 Bunagana, dans l’escarcelle des rebelles

 Rébellion à dominante tutsi vaincue en 2013 par Kinshasa, le M23 ou « Mouvement du 23 mars » a repris les armes fin 2021, en reprochant aux autorités congolaises de ne pas avoir respecté un accord pour la démobilisation et la réinsertion de ses combattants. Si le président angolais Joao Lourenco a été récemment désigné par l’Union africaine (UA) pour mener la médiation dans cette crise impliquant le Rwanda, la tension est plus vive à l’est de la RDC.

 Ainsi lundi, la localité congolaise de Bunagana, un important centre d’échanges commerciaux situé à la frontière ougandaise, est tombée entre les mains de ces rebelles. L’armée congolaise a accusé le Rwanda d’« invasion » de son territoire.

Dans un communiqué publié mardi soir, le gouvernement congolais a durci le ton en condamnant « la participation des autorités rwandaises dans le soutien, le financement et l’armement » de la rébellion du M23. « Nous défendrons chaque centimètre de notre territoire », ajoute le texte diffusé par le ministère de la Communication, au lendemain de la prise par les rebelles du M23 de la localité de Bunagana.

 Pour le moment, le président Félix Tshisekedi est encore silencieux alors que plusieurs de ses compatriotes continuent de manifester en demandant une rupture diplomatique avec Kigali. L’ambassadeur rwandais Vincent Karega avait déjà été convoqué début juin pour recevoir une mise en garde « sévère » du gouvernement congolais.

Côte d’Ivoire : la vérité sur la supposée attaque terroriste

L’armée ivoirienne dément une attaque terroriste repoussée à la frontière avec le Ghana, relayée sur les réseaux sociaux.« L’Etat-major général des armées constate avec regret la propagation sur les réseaux sociaux d’une information relative à une attaque terroriste qui aurait été repoussée à la frontière ivoiro-ghanéenne », indique un communiqué du Bureau d’Information et de Presse des Armées (BIPA)

« Cette information, reprise par certains média professionnels ne repose sur aucun fait tangible et avéré dans la région et la période alléguées », affirme l’état-major général des armées ivoiriennes.

L’état-major général déclare que « des terroristes n’ont jamais été repoussés à cette frontière le week-end écoulé parce qu’ils ne s’y sont jamais signalés ».

L’armée ivoirienne qualifie de « rumeur » cette information, invitant les instigateurs à la responsabilité, parce que le terrorisme représente un péril sécuritaire majeur pour toute entité, et son évocation doit s’entourer de prudence.

« En tout état de cause, l’Etat-major général des armées a toujours informé les populations des alertes et attaques terroristes signalées ou survenues sur toute l’étendue du territoire national, mission à laquelle le BIPA, son service de communication ne s’est jamais dérobé », indique le document.

La Côte d’Ivoire est dans le viseur des groupes jihadistes. En mars 2016, trois assaillants tuaient 19 personnes sur la plage très prisée de Grand-Bassam, près d’Abidjan. L’attaque terroriste revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), a été la première de ce type perpétrée sur le territoire ivoirien.

En juin 2021, plusieurs militaires avaient perdu la vie lors d’attaques jihadistes au nord du pays exposé au risque d’attaques. Un important dispositif sécuritaire a été déployé dans cette partie du pays pour prévenir les risques d’éventuelles attaques.

Mali : que cache l’arrestation du chef jihadiste Oumeya Ould Albakaye

Pendant qu’elle se retire du Mali, la France arrête un chef jihadiste lié à l’Etat islamique.Que cherche à prouver la France ? Alors que ses forces se retirent progressivement du Mali, elle continue de mener des opérations militaires dans ce pays sahélien, malgré la demande formulée par la junte au pouvoir de retirer ses troupes « sans délai ».

Dans la nuit du 11 au 12 juin, l’armée française affirme avoir arrêté Oumeya Ould Albakaye, un « haut responsable » de l’Etat islamique au Sahel, anciennement appelé Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS).

L’Etat-major des majors des armées françaises précise dans un communiqué publié mercredi 15 juin, que l’opération ayant permis de capturer ce « haut responsable » de l’Etat islamique au Sahel l’EIS à la frontière malo-nigérienne, est le résultat d’une traque de plusieurs semaines dans laquelle différentes capacités aériennes et des unités terrestres ont été mobilisées.

Selon le journaliste Wassim Nasr, spécialiste des mouvements jihadistes, Oumeya Ould Albakaye a été arrêté en compagnie de trois autres personnes dans un campement à Labzanga, non loin de la frontière avec le Niger.

Chef de l’Etat islamique au Sahel dans le Gourma, au Mali et pour l’Oudalan, au nord du Burkina Faso, Oumaya Ould Albakaye est le successeur d’Abdel Hakim al Sahroui, mort des suites d’une maladie.

Il est décrit comme le planificateur de plusieurs attaques contre différentes emprises militaires au Mali, dont celles de Gao. « Il dirigeait des réseaux de mise en œuvre d’engins explosifs improvisés. Responsable d’un grand nombre d’exactions et d’actions de représailles menées par l’EIGS par l’EIGS (Etat islamique au Sahel depuis mars 2022) », ajoute le communiqué de l’EMA.

Mais quel cachet faut-il donner à cette arrestation annoncée au lendemain de la rétrocession par les forces françaises de la base de Ménaka aux Fama ? Chercheur à l’Université de Bayreuth, en Allemagne, Adama Sandor décrypte cette intervention française en la reliant à l’incapacité de l’armée malienne à porter des coups d’envergure contre les groupes jihadistes dans la région des trois frontières. Pour le chercheur, c’est un message subliminal lancé à Bamako pour lui signifier qu’elle a encore besoin des services de ses partenaires internationaux dans cette région devenue l’un des repères des insurgés islamistes.

L’Etat-major des armées célèbre un « succès » en espérant qu’il déstabilisera à nouveau le haut commandement de l’EIGS (actuel EIS) dans la zone des trois frontières ». Le même groupe avait été la cible de plusieurs opérations de Barkhane, ayant abouti à l’arrestation de nombre de ses cadres et à la neutralisation d’Adnan Abou Walid al Sahraoui, au mois d’août 2021. Ces actions avaient pour objectif d’affaiblir le groupe jihadiste né en 2015 des flancs d’Al Mourabitoune, alors sous le commandement de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar.

Cependant, celui-ci, promu 7e province de l’Etat islamique en Afrique, sous l’impulsion de son défunt commandant en chef, Abou Al Bara al Sahraoui, multiplie depuis mars les offensives dans le nord-est du Mali, où des affrontements sont régulièrement signalés entre ses combattants et les mouvements touaregs pro-gouvernementaux. Ces affrontements auraient fait 264 victimes civiles, selon les autorités locales citées par la note trimestrielle de la Minusma.

Mozambique : les attaques jihadistes s’intensifient

Quatre personnes morts et dix mille déplacés ont été notés la semaine dernière au Mozambique dans une nouvelle vague de violence liée aux djihadistes dans la province de Cabo Delgado.La province de Cabo Delgado est en proie à la menace jihadiste depuis quelques années. Les attaques y sont récurrentes selon l’organisation caritative Save the Children, qui a fait le point dans un communiqué.

Selon l’organisation caritative, une nouvelle vague d’attaques violentes a fait fuir les habitants du district d’Ancuabe, dans la province, du 2 au 9 juin.

« Ces incidents ont provoqué le déplacement de près de 10.000 personnes, et on estime qu’au moins quatre personnes ont été décapitées lors de ces attaques, les premières du genre dans ce district », a-t-elle précisé.

Ancuabe était jusqu’alors considéré comme étant à l’abri des attaques. Elle accueillait un nombre important de familles qui avaient déjà été déplacées dans d’autres districts et vivaient dans des camps.

« Ces scènes de violences inquiètent car elle touche des enfants qui étaient déjà exilés et qui sont témoins des combats pour la deuxième fois », a déclaré Brechtje van Lith, Directrice nationale de Save the Children.

La recrudescence de la violence a également vu les jihadistes liés à l’Etat islamique tuer un membre d’une force d’intervention régionale d’Afrique australe la semaine dernière, ainsi que deux ouvriers d’une mine de graphite appartenant à la société australienne, Triton Mineral.

Somalie : les Shebab rackettent les agriculteurs

Le groupe islamiste fait fuir les paysans en instaurant des taxes dans les zones qu’il contrôle.Depuis deux ans, la Somalie est en proie à une sécheresse. Celle-ci a plongé des millions de personnes dans l’insécurité alimentaire. Comme un malheur ne vient jamais seul, les Shebab hantent le sommeil des agriculteurs qui doivent s’acquitter de taxes pour vivre et travailler paisiblement dans leurs terroirs.

Selon le gouvernement somalien, cette situation a causé le déplacement de milliers de paysans, laissant derrière eux leurs exploitations parce qu’ils n’en peuvent plus. Un rapport de l’Institut Hiraal, publié en 2020, indique que la collecte d’impôts locaux auprès notamment d’entreprises a rapporté aux Shebab plus de 15 millions de dollars dans les parties de la Somalie où ils dictent leur loi.

Burkina Faso : bilan macabre après l’attaque de Seytenga

Le dernier bilan fait état de soixante-dix-neuf civils tués dans la sanglante attaque de Seytenga, au Burkina Faso.Ça fait froid dans le dos. A Seytenga, dans la province de Séno, à 276 kilomètres au nord-est de Ouagadougou, l’attaque contre des civils dans la nuit du samedi 11 au dimanche 12 juin a occasionné la mort de 79 personnes. C’est le bilan communiqué par le gouvernement vingt-quatre heures après un premier décompte de 50 décès parmi les civils.

Dans la soirée de lundi, le président de la transition, le Colonel-Lieutenant Paul Henri Sandaogo Damiba a décrété un deuil de trois jours à compter du mardi 14 juin.

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Symptomatique de la détérioration continue de la sécurité dans le nord du Burkina Faso, cette attaque attribuée aux jihadistes de l’Etat islamique au Sahel (EIS) est la plus meurtrière après la tragédie de Solhan, dans la province de Yagha (région du Sahel) où 160 civils avaient perdu la vie.

Arrivés au pouvoir en janvier par un coup d’Etat contre Roch Marc Christian Kaboré, les militaires avaient pris le pari de renverser la tendance.

Suivant cette logique, le président de la transition, le Lieutenant-Colonel Paul Henri Sandaogo Damiba s’est ouvert au dialogue avec les jihadistes locaux. Une position qu’il a réaffirmée lors d’une visite samedi 11 janvier à Barani, dans le centre-nord, pour décorer des gendarmes au lendemain d’une attaque qui a fait 4 morts parmi le Groupe d’action rapide, de surveillance et d’intervention (GARSI).

Mali : le mandat de la Minusma en discussion à l’Onu

Le Conseil de sécurité de l’Organisation des nations unies (Onu) examine, ce lundi 13 juin, la prolongation du séjour des Casques bleus dans ce pays sahélien confronté au jihadisme.Le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) expire ce 30 juin. Il avait été allongé d’une année supplémentaire à la faveur de la résolution 2584 adopté à l’unanimité par les membres du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Actuellement, la question du maintien ou non de la Minusma, mise en place le 25 avril 2013, pour appuyer le processus politique et effectuer des tâches sécuritaires au Mali, se pose avec acuité. Car la France n’est plus en odeur de sainteté dans ce pays dirigé par une junte. Ces derniers mois, les relations entre Bamako et Paris se sont dégradées. Le Conseil de sécurité des Nations Unies va se prononcer par vote le 29 juin prochain.

Burkina : la confusion règne après l’attaque contre des civils au nord

Que s’est-il passé à Seytenga ? Depuis plus de vingt-quatre heures, des informations font état de la mort de plusieurs dizaines de civils après le passage dans cette ville du nord-est du Burkina, proche de la frontière avec le Niger, dans la nuit du samedi 11 au 12 juin.Après une première attaque ayant coûté la vie à onze gendarmes dans cette ville de la province de Séno, à 276 km au nord-est de Ouagadougou, les assaillants seraient revenus pour cette fois-ci, s’en prendre aux civils. Le gouvernement confirme que des « individus armés ont fait irruption dans la commune de Seytenga pour s’en prendre aux populations ».

Selon les autorités, cette situation a provoqué un déplacement des populations de cette localité vers la commune de Dori, située à 47 kilomètres. Cependant, au regard de la « complexité de la situation », le gouvernement assure qu’« à l’heure actuelle, un bilan officiel ne peut pas être établi ».

Invitant les burkinabè à se démarquer des bilans hâtifs et des chiffres diffusés sans vérifications préalable, les autorités assurent que « des unités d’intervention ont été déployées dans la zone en vue d’évaluer la situation et de procéder aux opérations de sécurisation ».

Depuis 2015, le Burkina Faso tente désespérément de contenir une insurrection jihadiste dans sa partie septentrionale, proche de la frontière avec le Mali et le Niger. Pour changer la donne, le lieutenant-colonel-Paul Henri Sandaogo Damiba à la tête du MPSR (Mouvement patriotique pour la Sauvegarde et la Restauration) a renversé Roch Marc Christian Kaboré le 24 janvier 2022.

Dans sa volonté de rétablir la sécurité, le président de la transition a manifesté son ouverture au dialogue avec les jihadistes locaux. Une nouvelle orientation de la lutte contre les groupes jihadistes qui reste pour l’heure inefficace. En cinq jours, des localités du nord ont enregistré au total six attaques contre des forces de défense et de sécurité et des civils, occasionnant au moins 27 morts.

Sahel : pourquoi les humanitaires sont ciblés ?

La région, confrontée à la menace jihadiste, est de moins en moins sûre pour les travailleurs humanitaires.C’était un mercredi noir. Le 1er juin dernier, vers 18 heures, une équipe de la Croix-Rouge a essuyé des tirs d’hommes armés à bord de motos sur l’axe Koussané-Kayes, dans l’Ouest du Mali. Parmi les quatre membres du groupe, revenant d’une visite de terrain, le chauffeur malien et un humanitaire sénégalais sont tués.

Un drame qui relance le débat sur la sécurité des travailleurs humanitaires. Pourtant, « le droit international humanitaire prévoit clairement la protection du personnel sanitaire et des personnels de secours en temps de conflit. C’est d’ailleurs sa raison d’être. La première Convention de Genève adoptée en 1864 visait à protéger les blessés et ceux qui leur viennent en aide », rappelle le spécialiste Julien Antouly dans un entretien avec APA.

Dans le temps, cet arsenal juridique a beaucoup évolué, mais l’article 3 commun aux quatre conventions de Genève « octroie au Comité International de la Croix-Rouge (CICR), ainsi qu’aux autres organismes humanitaires impartiaux, le droit d’offrir leurs services aux parties au conflit ».

Partout où il y a des combats dans le monde, des organisations humanitaires s’emploient à remplir cette mission essentielle. « Au Sahel, la Croix-Rouge intervient aussi bien en matière de secours d’urgence que dans le cadre de projets de programmes de développement. Elle assiste les populations fragilisées par les crises sanitaires, les catastrophes, l’insécurité alimentaire et nutritionnelle, les inégalités et le changement climatique », précise Moustapha Diallo, chargé de communication de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) pour la région.

Directeur Général de Médecins Sans Frontières (MSF), Thierry Allafort explique qu’il y a un fort besoin de soins au Niger, au Mali, au Burkina et au Nigeria dans une moindre mesure. A l’en croire, dans la conduite de leurs missions, les travailleurs humanitaires ont toujours rencontré des risques.

« Mais l’aspect nouveau et particulièrement choquant des tragédies de ces dernières années est que des personnes ont été délibérément tuées bien qu’elles étaient clairement identifiées et connues en tant que membres du personnel de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, des Nations Unies ou d’Organisations Non Gouvernementales (ONG) », alertait le CICR en 1998, à l’occasion de la première réunion périodique sur le droit international humanitaire.

Une vingtaine d’années plus tard, le constat est toujours amer. Faute d’éléments suffisants accréditant la thèse de la préméditation, M. Diallo ne veut pas verser dans la spéculation, mais n’en déplore pas moins les attaques contre les travailleurs humanitaires.

« Dans de nombreuses régions où nous intervenons, être des cibles des terroristes et des milices d’auto-défense est une donnée avec laquelle nous devons composer. Il me semble que nous avons du mal à reconnaître cet état de fait », admet Thierry Allafort.

Cette tendance est confirmée par les statistiques de la base de données sur la sécurité des travailleurs humanitaires (AWSD, sigle en anglais). Rien qu’en 2020, elle a recensé 283 attaques contre 276 l’année précédente. Au total, ces assauts survenus dans 41 pays ont fait 484 victimes, entraîné la mort de 117 personnes et causé des blessures à 242 individus. A cela s’ajoute, 125 enlèvements.

Au Mali et au Burkina, en 2021, la même base de données a dénombré 52 incidents sécuritaires avec un fort taux d’enlèvements d’humanitaires. Pour la majorité des cas, les auteurs ne sont pas déterminés même si les groupes armés non étatiques sont souvent pointés du doigt.

Le 9 août 2020, six jeunes humanitaires de l’ONG ACTED ont été assassinés avec leur chauffeur et leur guide nigériens dans la Réserve de girafes de Kouré, à 60 kilomètres au Sud-Est de Niamey (Niger). Une atrocité revendiquée par la branche sahélienne de l’Etat Islamique.

Revirement

Il y a dix ans maintenant, l’action humanitaire était acceptée par les jihadistes contrôlant le Nord du Mali. Chef de la Sous-Délégation du CICR dans cette zone de novembre 2011 à novembre 2014, Attaher Zacka Maïga se souvient de sa rencontre avec Mokhtar Belmokhtar, dirigeant de la brigade Al Moulathamoune en rupture de ban à l’époque avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

« Je lui ai demandé pourquoi il a voulu discuter avec des responsables du CICR. Il a dit qu’il était au courant de notre travail et qu’il s’était déjà entretenu avec des responsables humanitaires en Afghanistan en 1990. Il a déclaré que nous étions une organisation crédible et sérieuse », a récemment témoigné M. Maïga dans la revue internationale de la Croix-Rouge.

Aujourd’hui, « les choses sont très différentes. Il existe une pléthore de groupes armés opérant au Mali avec parfois des agendas et ambitions peu clairs. Le travail humanitaire est plus difficile qu’il ne l’était en 2012 », regrette-t-il. De tous temps, argumente M. Allafort, « les négociations sont compliquées quand il y a plusieurs acteurs armés » sur le terrain.

Le document préparatoire du CICR pour la première réunion périodique sur le droit international analyse cette situation à travers la nature changeante des conflits : « La protection du personnel humanitaire expatrié et national relevait essentiellement de la responsabilité des parties au conflit. Celles-ci n’escortaient pas les équipes humanitaires, mais les laissez-passer et les autorisations fonctionnaient relativement bien. Car le système était basé sur une chaîne de commandement claire ».

De nos jours, l’action humanitaire peut être perçue comme « une entrave aux objectifs ultimes des parties au conflit ». Accusés de vouloir « évangéliser » les autochtones, Béatrice Stockly et Cecilia Narvaez Argoti, des missionnaires suisse et colombienne, ont respectivement été enlevées en janvier 2016 et en février 2017 au Mali. La première nommée a perdu la vie dans cette mésaventure.

Pour les groupes armés, le kidnapping d’humanitaires peut également être une source de revenus. Capturée à Gao, au Mali, où elle dirigeait une ONG d’aide à l’enfance, la Française Sophie Pétronin a recouvré la liberté en octobre 2020 en même temps que l’homme politique malien, feu Soumaïla Cissé et deux Italiens. En contrepartie, les autorités maliennes ont relâché plus de 200 membres présumés du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (Gsim) et auraient payé une rançon.

Tout compte fait, selon M. Antouly, le bouclier le plus efficace, « c’est de se montrer utile, neutre et impartial » sur le théâtre des opérations. « Discuter avec tout le monde, se rapprocher des communautés et adapter les opérations au contexte sécuritaire », ajoute le Directeur Général de MSF, permet de minimiser les risques. Cela dit, les organisations humanitaires ont toujours la possibilité de se retirer des zones de conflits lorsque les conditions ne sont plus réunies pour garantir la sécurité de leur personnel.

Burkina : dialoguer avec les jihadistes malgré tout

La persistance des attaques contre les forces de défense et de sécurité n’a pas dissuadé les autorités burkinabè à discuter avec les mouvements jihadistes.Vendredi 10 juin, le chef de l’Etat burkinabè, le lieutenant-colonel Paul Henri Sandago Damiba, était à Barani, dans la boucle de Mouhoun, à 232 kilomètres à l’Ouest de Ouagadougou. Le président de la transition voulait encourager les gendarmes du Groupe d’action rapide de surveillance et d’intervention (Garsi) qui, la veille, ont repoussé une attaque terroriste.

Selon un bilan officiel, quatre gendarmes ont perdu la vie au cours de cet assaut tandis qu’une dizaine d’assaillants ont été neutralisés. Après avoir décoré cinq éléments de ce détachement créé avec le soutien de l’Union Européenne (UE), le lieutenant-colonel Damiba a rappelé « qu’il faudra qu’on aille chercher les terroristes pour leur montrer que nous sommes supérieurs en tout point de vue ».

Le tombeur de Roch Marc Christian Kaboré en janvier dernier a précisé que cette lutte acharnée doit se faire en même temps que les mécanismes de dialogue. Comme son prédécesseur, le lieutenant-colonel Paul Henri Sandago Damiba a fait de la sécurisation du Burkina sa priorité. Pour cette raison, le président de la transition s’est dit favorable à l’ouverture de discussions avec les jihadistes locaux.

Cependant, cette option n’est pas encore porteur de résultats satisfaisants. Pour preuve, les attaques se multiplient dans le Nord du Burkina. Un pays en passe de devenir le ventre mou de la lutte antijihadiste au Sahel.

Juste avant l’attaque de Barani, le poste de sécurité du site minier industriel de Karma, dans le Centre-Nord, a été pris pour cible par des individus armés non identifiés. Un militaire et un civil sont morts ce jour-là.

Samedi 21 mai, l’armée burkinabè avait repoussé un assaut mené par 200 jihadistes à Bourzangha, dans le Nord-Est. Le communiqué de l’État-major des armées déplorait le décès de cinq soldats. Par ailleurs, l’appui aérien de la force Barkhane, en cours de retrait du Mali, pour neutraliser « les assaillants qui tentaient de fuir » a été salué par les autorités burkinabè.

Burkina Faso : attaque contre un site minier industriel

Au Burkina Faso, les opérations contre les industries minières se multiplient.La dernière attaque en date est survenue dans la nuit de mercredi à jeudi. Menée par des individus armés non identifiés, l’offensive a visé le poste de sécurité du site industriel de Karma, situé dans la commune rurale de Namissiguima, dans le Centre-nord du pays.

Selon un bilan non officiel, l’assaut aurait fait deux morts, un civil et un militaire. Des armes auraient été emportées par les assaillants, rapportent plusieurs sources. Les autorités burkinabè n’ont pas encore réagi.

La mine d’or visée, est exploitée par Néré Mining, détenue à 90% par un entrepreneur local qui a racheté les parts de la société britannique Endeavour. La transaction a été évaluée à 25 millions de dollars. Un investissement compromis par cette attaque qui n’est pas revendiquée, pour le moment.

Ce n’est pas la première fois que les industries minières sont ciblées au Burkina Faso. En novembre 2019, un convoi de travailleurs de la société canadienne Semafo a été pris pour cible sur la route reliant la mine de Boungou et celui de Mana. Cette embuscade avait occasionné la mort de 37 personnes, le plus lourd bilan enregistré dans le nord du Burkina Faso depuis 2015, année marquant le début de l’insurrection jihadiste, dans le nord du pays.