Société




Bénin : le nord en état d’alerte

L'extrême nord du Bénin sombre lentement dans la violence. Les conflits locaux facilitent l'implantation des groupes djihadistes et les chefs…

L’extrême nord du Bénin sombre lentement dans la violence. Les conflits locaux facilitent l’implantation des groupes djihadistes et les chefs religieux se montrent préoccupés.

Les attaques terroristes dans le nord du Bénin, attribuées à de probables groupes djihadistes, préoccupent les leaders religieux musulmans et chrétiens. Des initiatives de sensibilisation sont conduites pour éviter toute crispation entre les communautés.

De fin novembre 2021 à début février 2022, trois attaques de présumés groupes djihadistes ont été recensés à Porga, Banikoara et dernièrement dans le Parc national W.

Ce parc, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, a rouvert après une longue fermeture, qui avait été décidée en raison des risques sécuritaires.

Dans cette région frontalière avec le Niger et le Burkina Faso, un climat de peur règne, estime le père Boris Kpenetoun, vice-secrétaire pour le dialogue interreligieux au sein de la Conférence des évêques du Bénin. Il confie à la DW qu’l y a «  une certaine inquiétude, une anxiété qui se manifeste progressivement dans le sentiment des populations. Car on parle de djihadisme. Et quand on dit djihadisme, c’est l’islam qu’on voit. »

Alors que les attaques se multiplient, les musulmans redoutent d’être stigmatisés. L’imam Hanasse Alidou insiste ainsi sur le fait que ces terroristes n’ont rien à voir avec l’islam.

« Nous-mêmes, nous sommes leurs ennemis et ils ne peuvent pas venir devant nous pour chercher quoi que ce soit. Nous-mêmes, nous sommes en train de nous sensibiliser. Chaque fois, on prie dans les mosquées pour que ce qui a commencé dans le nord du Bénin ne devienne pas comme au Mali, au Burkina Faso ou au Nigeria » précise t-il.

Sensibiliser pour éviter le pire

Les représentants religieux musulmans multiplient donc les messages de sensibilisation pour empêcher ce dont le Bénin est resté épargné jusqu’à présent : les conflits interreligieux.

Le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans ainsi que l’Etat islamique au grand Sahara ont leur base au Burkina Faso et au Niger voisins. Le nord du Nigeria représente aussi une source d’insécurité avec la présence du groupe Boko Haram.

Cependant, le socio-anthropologue Issifou Abou Moumouni, expert au Laboratoire d’études et de recherche sur les dynamiques sociales et le développement (Lasdel), n’exclut pas qu’il y ait des ressorts locaux qui servent d’appui aux groupes terroristes externes. Il explique ainsi à la DW qu’avant d’opérer convenablement «  il faut qu’ils maîtrisent le terrain. Et pour qu’ils maîtrisent le terrain, il faut des informateurs sur le terrain, des gens qui connaissent mieux le terrain. Donc, ça suppose que ces informateurs soient forcément des Béninois. »

D’autres facteurs

Une étude du Lasdel, menée juste après la première attaque en novembre 2021, confirme d’ailleurs une présence ancienne de terroristes à Kalalé, Nikki et Porga.

Une autre étude, cette fois de l’Institut Clingendael, indique que des mesures de sécurité prises par la société sudafricaine qui gère le Parc national W affectent les éleveurs. Le djihadisme peut aussi se greffer sur ce genre de conflits.

Enfin, une influence grandissante du Koweït et de l’Arabie Saoudite est visible dans certaines régions du nord du Bénin, à travers des formations religieuses, la construction de mosquées, d’écoles et de puits.

Mais pour l’instant, il n’existe aucune preuve d’un lien entre cette présence et une forme de prosélytisme en faveur d’un islam radical.

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